samedi 12 mai 2007

Marseille au son du reggae

Les représentants de « reggae music » sont nombreux dans la cité Phocéenne, des vieux de la vieille aux jeunes qui montent. Pour vous, j'ai souhaité comprendre l’origine de cet engouement aussi bien du côté des spectateurs que de celui des acteurs de ce mouvement. Le mois dernier, nous avions rencontré Dawta Jena & Urban lions, groupe créé en 2002, qui insuffle avec leur reggae un délicieux message de tolérance et d’unité. Aujourd’hui, continuons ce chemin à la rencontre des vibes positives d’une toute jeune formation, Messengers, groupe qui nous entraîne par leur son roots et délicat dans un voyage immobile vers des contrées apaisées.

Rencontre avec Jean-Christophe et Julien, membres du groupe Messengers :

Depuis quand existe le groupe et quelle est son histoire ? Pourquoi le choix du nom Messengers ?
J.C : C’est seulement en juillet 2006 que nous avons lancé le groupe sous le nom Messengers. Mais le groupe est né de ma rencontre avec Paul (qui joue également avec Dawta Jena) en septembre 2004. Nous avons commencé à composer ensemble et nous avons quitté respectivement nos groupes pour créer Messengers. C’est Paul qui a choisi ce nom en référence au message humaniste des rastas dans la lignée desquels nous souhaitons nous placer. Le batteur et moi jouions également dans un groupe ensemble.
Julien : Les autres membres sont arrivés peu à peu au hasard des rencontres pour arriver à la formation actuelle où nous sommes huit. Pour ma part par exemple, c’est né de la rencontre improbable avec un Burkinabé qui était ami de Jean-Christophe. Je cherchais alors un groupe reggae et l’idylle est né ce jour là (rire). Pour les cuivres qui font partis du groupe depuis deux semaines, ils viennent du groupe Mistraelite.

Quel est le message que porte votre musique ? Comment la définissez-vous et quelle(s) particularité(s) affichez-vous ?
Notre musique porte l’idée que les humains sont frères et sœurs. Elle dit que chacun peut s’intégrer à la communauté et en faire partie. Nous souhaitons également l’intégration de l’Homme à la nature. Il ne faut pas que les Hommes aient des a priori. Il faut vraiment essayer de se connaître au lieu de s’affronter…voilà le message de notre musique. Notre reggae est tout simplement du reggae roots mais notre particularité c’est que notre chanteur est Anglais. Notre reggae est donc purement Anglophone. Mais ce n’est pas une musique figée, elle est en constante évolution et dans un futur proche ce sera très métissé avec des sons ressemblants aux musiques Américaines des 60’s. Nous sommes très ouverts et très curieux des autres musiques. Même si on adore le reggae, nous ne sommes pas des fanatiques !

De nombreux artistes s’inscrivent dans la mouvance reggae sur Marseille. Est-il aisé de se faire connaître sur Marseille ? Une réelle unité existe-t-elle entre chaque membre de ce réseau reggae Marseillais ?
Heureusement que certaines radios sont ouvertes et existent car l’accès aux radios commerciales est bouché. Trouver des dates n’est pas non plus évident et en cela, le réseau peut évidemment aider. Mais malgré le partage d’idées humanistes, de tolérance et de paix, le reggae n’applique pas toujours ses propres principes. Cela fait plaisir lorsqu’un artiste ne veut pas seulement se faire connaître et se montrer mais faire découvrir et partager. Je ne pense pas qu’il y ait un vrai rastafarien à Marseille sauf peut-être Jo Corbeau…C’est dommage le manque d’entraide, par exemple les Gang Jah Mind ont un talent fou mais ils ne sont jamais vraiment sortis…

Quels sont vos projets d’avenir ?
Nous sommes pour le moment en fin de préparation, puisque la forme finale n’est que très récente. Mais nous avons deux dates pour le mois de juin. Le 23 à la fête de Lançon de Provence et le 29 à Salon de Provence au camping Nostradamus. Nous finissons également l’enregistrement de la nouvelle démo, nous ferons un véritable enregistrement plus tard lorsque notre travail sera plus abouti. Mais ce sera certainement dans l’année…

Messengers, un groupe naissant qui poursuit la route ouverte par ses aînés et qui fait écho au message lancé par Bob Marley, première star du reggae. Bob Marley, artiste qui était à l’honneur en ce jeudi 10 mai au cinéma Les Variétés. Un évènement organisé par l’association La plage sonore, structure Française domiciliée dans le 6ème arrondissement Marseillais qui œuvre dans le secteur de la musique depuis 1989. Sa principale activité se concentre autour de l’accompagnement de groupes mais elle travaille également à l’organisation de soirées évènementielles alliant cinéma et musique telle que celle mise en place en cette douce soirée de mai.
En ce jour de commémoration de l’abolition de l’esclavage et à la veille de l’anniversaire de la mort du maître du reggae, le public était au rendez-vous malgré une communication minimaliste. La ferveur derrière ce mode de pensée, cette philosophie de vie, cette religion est impressionnante…enthousiasmante à vrai dire. Des individus…amis ou inconnus, rastafariens dans l’âme ou simple curieux d’apprendre de ce grand homme venus se rassembler autour d’une même pensée humaniste ! Une bien belle chose en notre temps de décadence ! Retour sur l’origine du rastafarisme…
La Jamaïque, terre d’origine du mouvement rasta a essuyé la colonisation par l’Espagne au début du XVème siècle. Après avoir épuisé la population Indienne locale, les Espagnols firent importer des esclaves Africains pour remplacer cette main d’oeuvre devenue trop lente. C’est en 1655, que l’Espagne fut dépossédée de la Jamaïque par les Britanniques et celle-ci y laissa ses esclaves. Ceux là se soulevèrent alors contre la domination Anglaise, première lutte acharnée pour leurs droits. La force de ce combat résidait dans la cohésion existante entre les combattants et leur forte volonté d’indépendance. Cette bataille fut menée par Sam Sharpe, forte puissance charismatique de ce groupe d’Africains. C’est lui qui décida en 1831 de mener une grande rébellion qui devait aboutir à l’abolition de l’esclavage. Se suivirent alors plusieurs rébellions successives qui forgeront la tradition de résistance à l’autorité du peuple Jamaïcain, tradition que l’on retrouve dans le rastafarisme. Mais ce mouvement deviendra véritablement religion après la déclaration de Marcus Garvey en 1916. Discours au cours duquel il déclara Haïlé Sélassié, alors empereur de la plus ancienne dynastie du monde l’Ethiopie, seigneur des seigneurs, roi des rois et Dieu du peuple rasta. Dans son sens le plus absolu, le rastafarisme est une religion messianique basée sur Haïlé Selassié, humain de la première heure, qui a lutté toute sa vie avec un incommensurable héroïsme pour la libération et l’unité de son pays. Son prophète étant Marcus Garvey, qui a valorisé la négritude permettant par la même l’affirmation des noirs dans toute l’Amérique au même titre que Martin Luther King ou Malcolm X.
C’est donc empreint de cette idéologie que Bob Marley a mené sa vie et que nous voici quelques 25 ans plus tard rassemblés pour lui rendre hommage. Pour saluer le message de paix qu’il a voulu transmettre par la musique, ce langage universel. Réunis pour célébrer l’humanité au-delà des frontières et des pseudo différences devant ce documentaire inédit en France qui nous a emmené pendant une heure trente dans un monde où harmonie rime avec lutte pacifique pour un monde plus juste. Un univers où seul le combat pour la liberté prime, la liberté individuelle pour la liberté confraternelle ! Loin de l’image erronée et réductrice d’un mouvement où tout tourne autour de la Ganja (l’herbe), celle qui ferait voir la vérité du monde selon Bob, le rastafarisme est une idéologie humaniste et fraternelle…fraternité présente dans notre triptyque laïque mais trop peu palpable dans cette société contemporaine qui voue un culte à la différence par ses stéréotypes et multiples étiquettes. La pensée rasta rassemble à Marseille, ville multiculturelle et multicultuelle par excellence, et il serait bon de la répandre dans le monde entier…

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