jeudi 13 décembre 2007

Marseille : Salon Métierama du 24 au 26 janvier 2008 [2]

Chimie et biochimie à la mode écolo

Les métiers de l’industrie chimique et biochimique sont des métiers en tension où les offres d’emploi sont supérieures aux demandes. Depuis presque quinze ans, les jeunes sont de plus en plus nombreux à s’en détourner principalement du fait d’une méconnaissance du secteur. Pourtant, celui-ci offre des débouchés considérables avec une durée moyenne de recherche d’emploi inférieure à un mois selon l’ANPE.
Si vous êtes curieux, persévérant ou bien encore « Géo Trouvetou » dans l’âme, les métiers de la chimie et de la biochimie sont faits pour vous ! Comment faire des compacts disques à partir du maïs ? Comment transformer le pétrole en matière plastique ? Comment neutraliser les polluants dans la mer ? Ou bien encore, comment aider une enzyme à se développer ? Autant de questions auxquelles ce secteur industriel - innovant par excellence -, tente de répondre en s’adaptant à notre univers en constante mutation. Un monde dans lequel les tendances écologiques actuelles entraînent une redynamisation.
De l’ouvrier à l’ingénieur, du créateur de cosmétiques au professeur, en passant par les techniciens et agents de maitrise, la chimie et la biochimie proposent des emplois à différents niveaux de compétences. De nombreux parcours sont envisageables : BEP, Baccalauréats professionnels, IUT mais aussi cursus LMD ou bien encore l’IUFM.
Rendez-vous donc au pôle Chimie et biochimie du Salon qui vous proposera une conférence dirigée par la Fédération des industries chimiques, ainsi que des rencontres avec les enseignants des disciplines concernées.

Marseille : Salon Métierama du 24 au 26 janvier 2008 [1]

Discrimination à l’emploi : faire valoir ses droits

Poursuivre des études pour exercer le métier de ses rêves sans y parvenir, avoir le profil adapté et n’être toutefois jamais embauché…N’être regardé que par le miroir déformant de la couleur de peau, ou bien tout simplement recalé par la consonance du nom inscrit sur un cv...Autant de cas de figure qui perdurent pour autant de discriminations à l’emploi prohibées par la loi. Aujourd’hui encore, quatre fois sur cinq un candidat dit « d’origine hexagonale ancienne » est favorisé face à un demandeur d’emploi français d’origine africaine. Le chômage touche, lui, trois fois plus les jeunes diplômés issus de l’immigration que les autres.
L’égalité, inscrite dans le triptyque français, n’est toujours pas – au XXIème siècle – respectée. La Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité), représentée en région PACA par Madame Eskenazi, la promeut en combattant les discriminations. Sensibilisation et engagement des entreprises, information et accompagnement des personnes discriminées, valorisation et diffusion des bonnes pratiques ; pour que les comportements ségrégationnistes cessent et que jaillisse l’égalité des chances pour tous.
Si des entreprises œuvrent dans le sens de l’acceptation et de la valorisation de la différence, certaines réitèrent encore les comportements discriminants. Victimes de ce type de conduite ou, tout simplement, désireux de savoir s’en prémunir, rendez-vous au salon, à l’espace consacré à l’inclusion des jeunes dans le monde du travail.

vendredi 7 décembre 2007

Semaine Azerbaïdjan au Théâtre Toursky

Résolument ouvert sur le monde et le partage entre les cultures, le Théâtre Toursky a mis l’Azerbaïdjan à l’honneur durant la dernière semaine de novembre. Roustam Ibraguimbekov, célèbre scénariste, dramaturge et producteur Azerbaïdjanais était présent à Marseille pour la diffusion d’Adieu ville du sud, long métrage inspiré d’une de ses nouvelles - Bakou, fin des années 80 - et la représentation de Cherche partenaire pour rencontres épisodiques, par le Théâtre Ibrus. Voyage initiatique à la découverte d’un univers psychologique et singulier…

Ibraguimbekov : l’homme du Caucase

Roustam Ibraguimbekov - diplômé de l’Institut de Cinématographie de Moscou – est l’auteur de plus de quarante longs métrages et scénarios pour la télévision, de nombreuses pièces de théâtre et œuvres en prose. Internationalement reconnu pour ses créations, il demeure néanmoins méconnu en France, où la culture Azerbaïdjanaise n’est que peu évoquée. D’ailleurs combien savent exactement situer ce pays ou encore conter son histoire géopolitique? L’Azerbaïdjan est un territoire du Caucase, dont la capitale est Bakou. Frontalier avec la Géorgie, la Turquie, l’Arménie, l’Iran et la Russie ; il a longtemps oscillé entre indépendance et intégration forcée. Finalement devenu autonome depuis l’effondrement du bloc communiste le 30 août 1991, ses dirigeants ont choisi l’alliance politique avec les Etats-Unis. Premier pays démocratique de confession musulmane à accorder le droit de vote aux femmes, il connaît aujourd’hui une situation macro-économique satisfaisante mais doit encore relever le défi de la diversification des ressources et d’une répartition plus juste des richesses. Des conflits politiques intérieurs, religieux et territoriaux persistent actuellement dans le pays. Ce sont tous ces particularismes historiques qui ont forgé et forgent encore les œuvres d’Ibraguimbekov, comme une signature, une empreinte inaltérable. Né en 1939 à la capitale, il a connu les différents régimes de son pays et en témoigne dans de nombreux films - Soleil blanc dans le désert (1970), Interrogation (1979), Garde moi, mon talisman (1986), Urga (1991), Près de l’Eden (1991), Soleil trompeur (1994), Le barbier de Sibérie (1998) et Est/Ouest (1999) – primés pour la plupart. Chronique du Caucase, crime, drame psychologique et historique se conjuguent dans ses œuvres qui offrent une place dominante aux relations parfois difficiles entre pays, et aux liens entre les Êtres. Le psychisme des personnages, la conscience et la perception comme terrain d’exploration.

Sur les planches comme sur écran

Tel est l’épine dorsale de Cherche partenaire pour rencontres épisodiques présenté au Toursky vendredi 30 novembre. Cette pièce de théâtre jouée depuis plus de cinq ans dans les pays de l’est, dont plusieurs représentations à Moscou, dresse le portrait d’un couple ordinaire confronté à la dureté du temps qui passe et au vide du quotidien. Une création théâtrale à l’empreinte cinématographique forte où un ménage apparemment sans accrocs vit dans la rassurante mécanique du bonheur illusoire. De ceux qui vu par le miroir déformant de l’extériorité nous ferait dire : « Ah, que j’aimerais leur ressembler ». Mais la réalité est mensongère… Lui est scientifique, elle – rédactrice dans une maison d’édition. Deux postes à responsabilités pour un couple d’intellectuels modèles hors du besoin financier. Le déficit ici se compte plutôt en tendresse, partage et intercompréhension. Sous forme de huit-clos dans le salon familial, c’est un duel psychologique qui s’engage pour ces deux êtres si apparemment solides que profondément perdus, à cran. Car donner l’impression d’être en harmonie est pour eux la seule façon de vivre. « Il vaut mieux jouir de la vie que d’en parler » précise le texte. Assumer les erreurs du passé et accepter que le temps érode, parfois, les sentiments est bien plus ardu et insupportable que travestir la vie. Dans un jeu de psychés où les faux semblants dominent, tout est finement orchestré pour donner un sens à l’existence. Une orchestration basée sur la frontière invisible, terrible et insidieuse entre l’imaginaire de chacun et la réalité commune. Elle, rêve son mari en amant fougueux ; lui, songe à sa femme en plantureuse créature qu’elle n’est pas. Autant de rêveries chimériques personnifiées sur le plateau par deux autres personnages, si bien que deux couples distincts et idéals s’offrent finalement au public. Cette œuvre théâtrale aborde l’épineuse question du regard d’autrui. De la différence entre l’être, le paraître et le vouloir paraître et du difficile et rare équilibre qui permet de faire taire cette dissemblance. « Chaque couple établit ses règles », les dits, les non-dits…Ici, vivre en couple c’est lutter contre le silence des ressentiments – avec la jalousie et le mensonge comme anges gardiens – pour continuer à vivre, à feindre le bonheur pour usurper le réel. S’affronter pour mieux se réconcilier, contrefaire pour demeurer heureux avant tout ; telle est la règle pour ces êtres qui se déchirent autant qu’ils s’aiment. Une référence non fortuite donc au célèbre Cadavre vivant de Léon Tolstoï où le bonheur est au-dessus de tout, de la vie même pour le héros Fédia qui se suicide pour que son épouse Lisa soit enfin heureuse. Cherche partenaire pour rencontres épisodiques est une pièce psychologique, désarmante, lancinante même où le jeu renvoie le spectateur au réalisme angoissant de cette situation. Cette universalité humaine de condition selon laquelle l’Homme a besoin d’être apaisé jusqu’au risque de se tromper lui-même…

lundi 26 novembre 2007

« Exilio, ou garder en soi ce que l’on nous a retiré »

Le Théâtre Gyptis accueillait mercredi 21 novembre la deuxième représentation d’Exilio, écrit et mis en scène par Sara Sonthonnax de la Compagnie Théâtre et Mémoires. Exilio, c’est une création inspirée des lettres trouvées par l’historien Jean-Jacques Jordi aux Archives départementales. Des courriers adressés en 1939 par ces républicains réfugiés dans les bateaux hôpitaux marseillais après avoir fui Franco. Des écrits qui n’ont jamais trouvé voix. Sara a souhaité leur rendre…

Sur les routes de l’exil

Miguel et Pablo ne se connaissent pas mais fuient tout deux le régime dictatorial franquiste. Les routes de l’exil les feront se rencontrer et partager leurs peines, leur désarroi et leurs doutes. Comme un échange de pensées, un partage de destinées en face à face ou séparés par des destins épars, Exilio procède à un devoir de mémoire tout en soulevant de véritables questions ontologiques. « Fuir l’Espagne, n’est-ce pas la perdre ? » ; « Quelque chose vaut-il plus que la vie ? ». Mais la liberté est aussi la vie…La perdre ne revient-il pas à renoncer d’être vivant ? Autant de questions auxquelles la réalité de la guerre civile n’offre pas de réponse. Seules les déchirures sont là, omniprésentes. Déchirure d’une fuite forcée, déchirure des familles qui se scindent pour parfois ne jamais se retrouver, déchirure de ces deux êtres que la route séparera. L’un, Miguel, choisit de rejoindre le Mexique; l’autre, Pablo, s’engage dans la résistance française contre l’occupant nazi. Malgré la distance, les deux hommes s’expriment d’une seule et même voix. Celle de la souffrance, de l’abandon et de l’injustice. Dans leur périple, ils évoquent les mots et les maux d’un peuple, de tous ceux qui sont déchirés entre l’envie de vivre et la volonté de ne pas partir, de ne pas abandonner pour ne pas se laisser vaincre. Ces deux êtres en perdition témoignent de cette déchirure intérieure, la plus insupportable, certainement. Leurs sentiments et ressentiments sont rejoints par le chant d’Emilie Lesbros dont la voix et l’ombre déambulent par intermittence sur scène. Telle une apparition fantomatique, son chant improvisé est doux, profond, fragile et douloureux - à propos, quoi qu’il en soit. Comme un chant de l’exil qui vient rythmer l’échange discursif, il stigmatise les souffrances comme l’image redondante du train de la mort dans Amen, le célèbre drame historique de Costa Gavras. Pour autant, le pathos ne prend jamais le pas sur le témoignage…

Un texte sensible et pudique

La mise en scène est sobre et le plateau dénudé. Les deux acteurs évoluent de déambulations avant en mouvements arrière selon que les chemins les unissent ou les divisent. La lumière, elle, suit les codes conventionnels : rouge pour le sang, bleue pour la mer. Une mise en scène quelque peu limitée, simpliste pourrait-on dire…Mais comment faire autrement ? Sara Sonthonnax affronte ici un exercice difficile. Celui de mettre en scène un sujet ardu, douloureux, qui rouvre pour certains d’anciennes douleurs. Mais aussi, celui de porter aux vues l’adaptation théâtrale d’écrits initiaux, leur rendre voix sans dénaturer la réalité - sans l’occulter ni la farder. Une mise en espace plus construite, plus concrètement élaborée n’aurait-elle pas été risible ? Plongeon dans l’emphase et la grandiloquence, ou bien altération du message ; elle serait certainement venue gâcher le texte. Nous saluerons l’audace de la metteuse en scène et la beauté de son texte ; limpide, sensible, pudique et juste – à la lisière de la poésie parfois. Un de ces textes qui font entrevoir des images, celle des barbelés des camps d’Argelès dans les Pyrénées-Orientales ou celle de la tramontane, ce coriace vent catalan venant fouetter les visages des malheureux – « même le vent est fasciste ! » disaient ironiquement certains -. Car s’il ne se joue pas de faux-semblant, Exilio ne manque pas d’humour. « Si seulement la pluie pouvait pleurer à chaudes larmes », « Au moins le menuisier a du travail »…Autant de marques d’esprit qui brisent dans l’instant toute immersion dans le pathos. Quant au jeu, Alfonso Rodriguez Gelos et Vincent Saint-Loubert Bié, offrent une interprétation délicate, soutenue et musicale, à l’orée d’un parlé slamé pour le second. Un spectacle qui vaut amplement le fait d’être vu pour sa justesse, sa pertinence et son témoignage d’une époque trop méconnue. Une revanche judicieuse et touchante pour Sara dont la famille avait plutôt versé du côté des assaillants. « On ne choisit pas d’où l’on vient, mais on choisit où l’on veut aller… » dit-elle, et on ne saura que l’en féliciter !

dimanche 25 novembre 2007

Enchanter la danse pour qu’exulte la liberté

Dans la soirée du 23 novembre, Merlin Nyakam – créateur de la compagnie La Calebasse et célèbre danseur et chorégraphe africain - est venu présenter sa dernière création sur les planches marseillaises du Théâtre Toursky. Cette même scène où il a débuté sa carrière en France il y a maintenant plus de dix ans. Ce dernier opus, intitulé Liberté d’expression, nous ramène par les impulsions du corps et les rythmes afros au souffle de vie originel qui court en nous. Un spectacle aux antipodes des extravagances et des perditions d’une société bien trop axée sur l’image et l’apparence…

Merlin, l’enchanteur des corps

Tout commence au son des battements du cœur d’un fœtus projeté sur le blanc immaculé de la robe portée par un danseur. Le rythme du cœur pour celui de la vie…Endiablé et festif selon Merlin. Les percussions africaines s’animent, les corps des huit danseurs s’agitent dans une intrépide chorégraphie colorée ; et c’est la vie qui envahit l’espace scénique…Farandole de couleurs éclatantes, tourbillon de danseurs aux corps sculpturaux ; et la chair se mue en un contour unique pour ne former qu’un : l’humain. Accompagné de sa baguette magique, Merlin Nyakam ne pouvait rêver prénom plus justement destiné. Merlin - cet enchanteur des corps, ce chorégraphe magicien – exalte par la danse la diversité de l’être en le rassemblant autour de son unicité, de son intrinsèque similitude. Avec lui, la danse devient art total pour une pleine liberté d’expression. Elle extirpe au théâtre ses modes d’expression, au chant et à la musique leur valeur émotionnelle et aux arts plastiques leur profondeur sensorielle. Liberté d’expression joue sur tous les canaux et devient une mosaïque de sens, de couleurs, de formes mouvantes où le rideau de fond de scène se plait à décupler ces corps devenus ombres chinoises. La valeur esthétique de l’ensemble est fondamentale et vient se mêler au talent incontestable des danseurs de la troupe. Merlin Nyakam dirige ses artistes d’une main de maître, avec une poigne, un charisme qui semble joint à un gant de velours. Le sourire toujours franc et le rapport au public aisé, il charme et attendrit. Avec tout son talent, la danse donne à réfléchir sans céder du déjà pensé, en toute subtilité.

Quand la danse exalte la liberté

Avec Merlin Nyakam, elle devient aussi l’emblème de l’expression enfin libérée. Sous un trait de légèreté, les thèmes sont essentiels : la religion, l’image de soi, le rapport à cet autre – si différent mais si semblable – et l’amour. L’amour qui réunit finalement ces cinq personnages qui se déchiraient jusqu’alors – un lama tibétain, une religieuse, un homme de la rue au look de rappeur, un homme en costume et borsalino, et un autre en toge noire. Liberté d’expression est une piqure de rappel pour témoigner des barrières formées par les divergences religieuses. Le reflet de soi, le lien social, l’égocentrisme sont symbolisés, eux, par les danseurs valsant devant leur miroir, pour se rejoindre finalement. « Vous vous croyez seul ? Vous ne l’êtes pas. Vous n’êtes jamais seul » entend-t-on en voix off. La danse réunit ici les corps, les âmes pour partager et unir dans la joie. Pas de pathos, pas d’emphase, seulement un message en guise d’avertissement, un appel où l’humour n’est d’ailleurs pas de reste…Liberté d’expression offre tantôt de franches rigolades et se conjugue, parfois, à l’ironie pour décrier la distension des liens par nos modes modernes de communication – raillant d’ailleurs autour de l’objet « téléphone portable » -. Il accuse notre société d’accroître l’individualisme et de cultiver la différence sans pour autant l’accepter. Le spectacle, lui, l’exalte en l’admettant ; offrant une place primale à la liberté. Liberté d’expression fait valser les préconçus et porte un regard critique, en tendresse et en espoir, sur le monde. Les artistes s’amusent visiblement sur scène, et nous aussi ! Emportés par le flot des messages et de la danse, l’heure de spectacle s’achève bien rapidement ; et le public en redemande, encore... Que le temps se contracte lorsque les instants sont si justifiés, subtils et délicieux!

(crédit photo : Sylvie Martin)

vendredi 9 novembre 2007

Exilio au Théâtre Gyptis

Pour ceux qui ne le savent pas encore, le théâtre Gyptis fête cette année ses 20 ans d’existence aux mains de Françoise Chatôt et Andonis Vouyoucas. Vingt ans de vie dans un quartier de Marseille pourtant difficile, vingt ans durant lesquels le théâtre a su conquérir son public, toujours plus nombreux à venir plébisciter la diversité des spectacles proposés. Et cette saison 2007/2008 porte haut et fort les couleurs de la pluridisciplinarité : théâtre bien évidemment, mais aussi musique et danse viennent enrichir ce florilège artistique. Après avoir ouvert la saison avec L’école des femmes - mis en scène par Jean-Claude Nieto - et reçu une première approbation du public, cette nouvelle année théâtrale continue au Gyptis avec Exilio, écrit et mis en scène par Sara Sonthonnax.

Exilio, c’est un plongeon dans le chaos et la déchirure de la guerre d’Espagne et dans les exils forcés des républicains sous le régime de Franco au travers des lettres adressés par ces réfugiés depuis les bateaux hôpitaux Marseillais. « Ce n’est ni une fresque historique, ni un documentaire » explique Sara Sonthonnax, mais plutôt une pièce où l’évocation domine. Un spectacle à mi-chemin entre la lecture théâtrale et la pièce de théâtre où l’humour et l’émotion contenus dans les mots sont rejoint par une interprétation très musicale du texte. Une œuvre qui veut faire réagir sans donner du déjà pensé, sans tomber dans l’illustration ou le psychologique et sans emphase. Pour la metteur en scène, « le respect des écrits est essentiel et la distance et la pudeur sont indispensables ».
Mais Exilio, c’est avant tout un coup de cœur inopiné pour des lettres entendues par Sara en 2004 lors d’une lecture publique au Cercle des catalans à Marseille. Des lettres plus communes que lyriques, des écrits qui, par leur apparente banalité, témoignent plus justement de ce qu’était le quotidien. C’est un coup de foudre mais aussi une irrépressible envie de témoigner de cette guerre trop rarement évoquée dans le théâtre – une guerre dans laquelle la France n’a pas toujours joué un glorieux rôle. « Donner de la voix par l’acte théâtral » précise si justement l’auteure. Redonner vie à ces voix disparues, faire entendre ce qui est resté enterré dans les entrailles des Archives Départementales jusqu’à ce que l’historien Jean-Jacques Jordi les retrouve en 2000.
A Marseille, où la population catalane et espagnole est importante, ce spectacle sera pour les plus jeunes une découverte et pour les autres une immersion passéiste vers un pan méconnu de l’histoire espagnole et française. Quel que soit l’âge, il sera riche d’enseignement et trouve par le hasard de l’actualité une justification toute méritée - le parlement espagnol venant enfin d’accorder la réhabilitation des tombes des républicains.

Ecrit et mis en scène par Sara Sonthonnax de la Compagnie Théâtre et Mémoires, interprété par Alfonso Rodriguez Gelos et Vincent Saint-Loubert Bié, ce spectacle aura lieu du 20 au 24 novembre 2007 à 20h30 le mardi, vendredi et samedi ; et 19h15 le mercredi et jeudi. Réservation au 04 91 11 00 91. A noter : La représentation du 21 sera suivie d’un débat en compagnie de l’équipe de création et de Benito Pelegrin – Professeur émérite des Universités, écrivain, dramaturge, traducteur et chroniqueur -qui témoignera de cet exil forcé qu’il a vécu enfant.

jeudi 8 novembre 2007

Focus sur la recherche immunologique à Marseille

Eradiquer le paludisme placentaire
Face à la recrudescence actuelle des cas de paludisme, les recherches s’intensifient afin de développer de nouvelles molécules susceptibles de devenir des vaccins. L’accent est mis sur la prévention des formes les plus graves de la maladie. C’est ce dernier point qu’étudie Jürg Gysin, directeur de l’Unité de Recherche Associée (URA) mixte Institut Pasteur / Université de la Méditerranée Aix-Marseille II, et ses collaborateurs depuis 1996.

Une thématique de santé prioritaire

Le paludisme, maladie déjà connue au milieu du siècle dernier, est toujours aussi présent aujourd’hui. « Les mouvements de populations, le manque de moyens, la résistance du vecteur aux insecticides utilisés et les échecs de la lutte anti-vecteur alternative expliquent en partie cette constante » commente Jürg Gysin. En effet, on observe depuis quelques années l'apparition d'une résistance aux insecticides chez les moustiques et une chimio résistance chez le parasite, et la recherche n'a pour l'instant pas su apporter de solutions complètes. En cause ? Un développement coûteux des médicaments pour les laboratoires pharmaceutiques et des populations concernées majoritairement pauvres.
La situation d’endémie s’explique aussi en partie par une trop forte croyance en l’efficacité d’un hypothétique vaccin salvateur mais « un ralentissement voire un arrêt de la recherche pour le développement de nouveaux composants antipaludiques, en considérant que le vaccin allait apporter la solution a contribué à la persistance du parasite, car finalement la solution est plus compliquée que prévue» concède le scientifique. Le paludisme est ainsi devenu une des priorités de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Suivant ses recommandations, l’Institut Pasteur et d’autres laboratoires déploient dans plusieurs pays de nombreuses équipes de scientifiques se consacrant aux différents axes de recherche.

Le paludisme de la femme enceinte

Jürg Gysin est l’un d’entre eux. Avec son équipe, il focalise ses études sur le paludisme placentaire. Mais qu’est-ce que le paludisme ? Maladie infectieuse provoquée par un parasite – le Plasmodium – il est transmis par la piqûre d’un moustique femelle. Il y a quatre espèces dont le Plasmodium falciparum est le plus pathogène. A l’origine d’une véritable épizootie dans les zones tropicales, le laboratoire Marseillais concentre ses recherches sur cette dernière espèce.
La femme enceinte et son fœtus y sont particulièrement vulnérables. En cas d’infection, elle développe une forte anémie et une faiblesse généralisée qui entraînent un retard de croissance du fœtus qui peut compromettre à terme sa survie et celle de sa mère. Tous les efforts de l’équipe, associée à d’autres dans le monde, se focalisent sur l’élaboration d’un vaccin qui protégerait la femme enceinte et le fœtus d’une contamination. Les recherches ont pour l’instant abouti à l’identification des protéines qui permettent au parasite de s’installer dans le placenta et l’on sait que le développement d’anticorps contre cette protéine empêcherait cette installation. Une récente étude porte également sur un antigène parasitaire, le RSP2, impliqué dans le développement de l’anémie chez tout individu impaludé. Un espoir d’enrayer la pandémie se joue à Marseille où les derniers résultats de cet antigène permettent d’envisager des solutions thérapeutiques possibles.

Des candidats vaccins testés sur un primate

« Nous étions le seul groupe avec le CDC aux Etats-Unis à pratiquer cette approche à grande échelle et ce modèle a été utile à bien des égards pour l’étude de la fonctionnalité protectrice d’anticorps » précise l’expert à propos du singe Saimiri ayant servi aux tests. Mais malgré cette voie de recherche innovante « l’éradication du paludisme n’est pas aisé avec les problèmes de la chimiorésistance, l’appauvrissement des populations exposées, les déplacements massifs de population et la malnutrition» ajoute Mr. Gysin. De plus, le parasite mute et les réponses immunitaires protectrices doivent constamment se réadapter, mais Jürg Gysin envisage actuellement une solution possible. Pour autant, mettre au point un vaccin stable à un coût raisonnable n’est pas chose facile et « si on arrivait demain à produire un vaccin ou une immunothérapie, il faudrait sans doute encore du temps avant que cela ne devienne profitable à tous ceux qui en ont besoin ». Les recherches continuent pour enrayer les méfaits du paludisme à Plasmodium falciparum
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Jürg Gysin : directeur de l’unité de parasitologie expérimentale marseillaise

Après avoir exercé au sein de divers laboratoires d’immunologie parasitaire, en Guadeloupe, à Cayenne, New York et Lyon, Jürg Gysin - arrivé à Marseille sous l’impulsion de la Mission de la Recherche et de la Technologie (MRT) – poursuit ses recherches sur le paludisme. Accueillant des post doctorants, étudiants en DEA, Master ou thèse ; il a pu créer quelques contrats à durée déterminée. Egalement soutenue par la communauté Européenne, l’European Malaria Vaccine Initiative (EMVI), l’Agence Nationale de la recherche (ANR) et quelques groupes américains, l’unité de parasitologie expérimentale marseillaise se révèle être un des acteurs majeurs de la recherche antipaludique dans le monde.


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Le paludisme tue davantage que le sida

Chaque année, deux milliards d'individus sont exposés au paludisme qui provoque 200 à 500 millions de cas cliniques. Selon les estimations de l’OMS, cet agent pathogène entraîne la mort de 1 à 3 millions de personnes par an, soit un enfant toutes les trente secondes en Afrique. La situation semble plus grave encore qu’il y a cinquante ans, lorsque l’OMS pensait éradiquer ce fléau. Les différents laboratoires de recherche continuent leurs investigations sans pouvoir assurer, pour le moment, la naissance prochaine d’un vaccin. A l’heure actuelle, le paludisme cause davantage de décès que le sida.




dimanche 4 novembre 2007

Le Mexique a fêté les morts à Marseille

Du 1er au 8 novembre et pour la troisième année consécutive, Marseille a mis le Mexique à l'honneur à l'occasion de la fête des morts. Car à la différence de la France, la période de Toussaint est une joyeuse fête au Mexique. Ce festival, initié par l'acfm (association des cultures Franco-Mexicaines); parrainé par M. Andrès Henestrosa -grand écrivain mexicain âgé de presque 101 ans - soutenu par M. Carlos De Icaza et représenté par Yvan Romero - consul honoraire du Mexique à Marseille - s'annonce être une manifestation riche en partage et création où un point d'honneur est donné à l'interactivité. Invitation directe au voyage pour un véritable plongeon dans les traditions séculaires de la culture mexicaine...

La Toussaint Mexicaine ou comment fêter la mort

"La mort n'est pas triste chez nous" précise Ramon Solano, irrésistible mime mexicain. Le ton est donné...Cette période du début d'automne qui, chez nous en France, respire la tristesse et où le poids de la tradition nous pousse -nous impose presque - à revenir fleurir les tombes et à pleurer à nouveau nos défunts, est une fête au Mexique. Cette fête des morts puise son essence au coeur de la légende de l'humanité. Cette légende qui serait née des ossements des ancêtres mexicains mêlés au sang de Quetzalcoatl - la plus haute divinité aztèque - renfermerait les clefs de la philosophie mexicaine précolombienne qui ne dissocie pas la vie de la mort. La mort est une continuité logique, une sorte de seconde phase de vie qu'il ne faut donc pas pleurer. Depuis ce temps, lorsque l'heure de la Toussaint retentit, on vient faire des offrandes et chanter près des tombes pour fêter les morts. Cette cérémonie s'étendait naguère sur presque un mois offrant d'abord une fête aux enfants disparus - c'est le Miccaihuitontli - les adultes défunts, eux, étaient fêtés quelques vingt jours plus tard - lors du Hueymiccalhuitl. Avec les siècles et les successives conquêtes, ce mythe a évolué pour se nourrir des traditions indiennes et espagnoles qui ont fait fusionner ces deux fêtes en une unique, la Toussaint.

D'étranges créatures animaient le vieux port

Le parvis de l'hôtel de ville et le quai le jouxtant étaient noirs de monde jeudi et vendredi dernier. Il faut dire qu'il y avait de quoi...De nombreux artistes mexicains s'étaient donné rendez-vous pour l'occasion afin de faire le spectacle. Cirque, danse, théâtre, arts de la rue et musique ont fait la fête aux morts devant un public marseillais comblé. Ramon Solano, l'attendrissant mime mexicain, a rendu l'assemblée hilare en mimant tour à tour les attitudes féminines et masculines, en invitant deux spectateurs à monter sur une moto invisible ou encore en imitant tout simplement les passants. Montserrat Diaz, la statue vivante, véritable oeuvre d'art aussi figée que réelle a quant à elle rendu perplexe les plus jeunes : "Et maman, elle est vivante la statue??" entendait-on dire sur un ton naïf et étonné. Les ateliers de création d'objets typiques mexicains, les différents stands et les projections de films sur un rideau d'eau ont rassemblé tout autant de monde, visiblement satisfaits de célébrer la Toussaint autrement. Après une première phase aussi réussie, la Toussaint mexicaine a clôturé avec entrain ses festivités Marseillaises au Théâtre Toursky le dimanche 4 novembre pour continuer du 6 au 7 à Lyon et le 8 novembre à Carnoux en Provence.














Le Toursky à l’heure Mexicaine

Quinze heures sonnaient et le hall d’entrée du Théâtre Toursky s’ornait de toute la gaieté des décors de la Toussaint mexicaine et de toute une ribambelle de personnes venues découvrir cette autre fête des morts. Autel aux couleurs criardes, Montserrat en statue fantomatique et Ramon déambulant avec son chien en peluche, le Mexique avait envahi l’antre du théâtre par son âme bariolée et sa chaleur humaine. Côté cour et côté jardin, au balcon ou à l’orchestre, la salle de spectacle était généreusement remplie. Le spectacle, composé par les quelques trente artistes mexicains présents, pouvait commencer…C’est le groupe Tribu qui inaugura les réjouissances avec leurs musiques et leurs sons oniriques qui ont entrainé le spectateur vers des sphères éthérées, mystérieuses et envoûtantes. Le texte et le théâtre s’invitait aussi à la fête par une lecture théâtrale et dansante de la légende du Quetzalcoatl sur les sons de Tribu. Après cette première création qui a amplement conquis le public, Ramon fit son entrée sur scène et il ne lui fallu pas plus d’une minute pour rendre l’ensemble de l’auditoire rieur et enchanté. Jouant ses grands classiques et improvisant au gré des opportunités, son intermède humoristique satisfit le plus grand nombre. Les festivités allaient se clore par les pérégrinations extravagantes de la troupe Mascaras entre sombras, qui nous présentait un spectacle inspiré des traditions de la Toussaint mexicaine où les géants – protagonistes de l’histoire - mêlaient coutumes mexicaines et humour désopilant, voire grotesque.
Après plus de deux heures de spectacle, les animations ont continué sur la terrasse du théâtre dans une ambiance carnavalesque et typiquement mexicaine – tacos, tortillas et bière « Corona » garantis – pour le plus grand bonheur des petits et des grands ! Non décidemment, fêter Toussaint au Mexique ne manque pas de piquant !!!


mercredi 17 octobre 2007

Pierrot l'éternel gamin

Le 16 octobre dernier, le Théâtre Toursky accueillait celui qui réunit les générations autour de chansons douces, pétillantes, malicieuses et dénonciatrices. Pierret Perret – cet ami de Brassens - qui fête cette année ses 50 ans de carrière a littéralement épris les spectateurs de 7 à 77 ans…

Quand le théâtre devient chorale

Du haut de ses 73 ans qu’il porte à ravir, Pierre Perret – Pierrot dans le cœur de ses acolytes - a la bouille tendre et émerveillé d’un gamin espiègle. Débutant son tour de chant par la plus célèbre des cages, celle aux oiseaux, il a d’emblée donné le ton. Enfantin, coquin, mais aussi accusateur, tel serait le penchant de ce concert. De chansons métaphoriques à d’autres revendicatrices, cet être humble et humain a chanté l’amour et l’humour en poésie dans un spectacle résolument interactif. Car Pierret Perret c’est aussi l’échange et la proximité avec son public. Malgré une voix fragilisée par un rhume, il a chanté tant qu’il a pu devant un public marseillais qui l’a ovationné. Répondant aux assauts malins et à l’énergie de l’artiste, le public – enfin sorti de sa timidité - s’est mis à chanter et le théâtre est devenu chorale. Des enfants aux ainés, tout le monde a entonné ses refrains connus que sont Le zizi, Les colonies de vacances, Lily, Mon petit Lou ; mais aussi des chansons récentes dont Liberté Zéro où l’ami Pierre chante les injustices qu’il combat…

« Elle croyait qu’on était égaux Lily, Au pays de Voltaire et d’Hugo Lily »

Mais Lily avait tort et Pierrot le sait bien. Car l’artiste, en poète éclairé, est avant tout près de l’humain et de ses souffrances. Un des rares avec qui la vulgarité et la sexualité deviennent lyrisme, un de ceux qui chantent en clamant les injustices de ce monde, usant de l’humour quand le sujet est grave. Parler de tout en chanson, en tendresse et avec ironie pour « être attentif à la misère des autres et la ressentir avec son cœur et ses tripes ». Pierrot est généreux, sincère, sensible et son public sait le lire dans son regard – reflet de l’âme dit on – à la fois bienveillant, rêveur, réaliste et triste aussi. Il chante l’immigration, la misère, la violence et le racisme avec le chagrin dans la voix mais l’espoir dans le mot, le regard toujours droit devant pour avancer et combattre. Combattre les décadences et les errances d’un XXIème siècle naissant avec la douceur, la délicatesse et l’amour comme fer de lance. Un seul mot : Merci Pierrot!!!

lundi 15 octobre 2007

Circo Paradisio

Circo Paradisio, c’est une troupe de neuf artistes, un ensemble loufoque – quasi psychédélique – qui nous entraîne dans l’Histoire du cirque. Mais l’Histoire du cirque revisitée par Circo Paradisio, ça n’est pas un récit chronologique mais plutôt une fresque désopilante de laquelle on retient que le cirque « ça se transmet de génération en génération ».
Tout commence en 1664 – date bien connu des messieurs selon l’Auguste, animateur pour l’occasion – avec la famille Desjardins. Le premier de la famille entame son tour de piste et ses pseudos descendants feront de même tout au long des 2 heures de spectacle. Funambules volants, trapézistes, jongleurs, chanteurs, danseurs et même une femme sirène composeront peu à peu cette photo de famille des plus étranges. Le ton est plaisantin, très – trop ? – léger, bohème. On s’y moque de la religion – « Et si jamais Dieu existait, il faudrait s’en débarrasser » s’écrie l’Auguste -, on compare les humains aux poules – qui envahissent d’ailleurs le plateau – et les protagonistes parviennent même à rire de leurs propres blagues. C’est un cirque en folie qui a envahi le Toursky en cette soirée d’automne. Une folie qui atteindra son apogée avec le tableau final, digne des dernières minutes du film « The full monty ». Les costumes sont magnifiques, les arrangements musicaux originaux et adéquats, les artistes au sommet de leur art mais l’ensemble pêche par manque de cohérence, de structure. On retiendra néanmoins l’effort esthétique de l’ensemble, le talent des interprètes et le déroutant moment où l’Auguste, hypnotiseur à ses heures perdues, endormira une poule devant des yeux ébahis. On regrettera par contre un humour un peu flasque, parfois trop grotesque, qui laissera perplexe les adorateurs de la subtilité, de la finesse dans le rire.
Circo Paradisio, un spectacle qui, quelques arrangements effectués, pourrait évoluer en paradis du cirque…

samedi 13 octobre 2007

La cruche cassée

Texte d’Heinrich von Kleist, mis en scène par Frédéric Bélier-Garcia et adapté par Arthur Adamov. Théâtre national de Marseille La Criée du 10 au 13 octobre 2007. Durée du spectacle : 1h50.

« C’est qui qui, qui a cassé la cruche ? » s’exclame sur un ton plaisantin le greffier. Telle est la question, véritable épine dorsale de cette farce à la fois rocailleuse, grotesque et subtile. Cette farce qui prend sa source dans une estampe de Debucourt vue par l’auteur lors d’une visite en Suisse. Une œuvre représentant une scène anodine de justice villageoise.
Adam, juge désinvolte et enfantin de la province d’Utrecht, au fort penchant pour le vin et la bonne bouffe, se retrouve en train d’instruire son propre procès. Celui-ci a malencontreusement cassé une cruche alors qu’il s’enfuyait de la chambre de la jeune Eve – fille de la douce folle Dame Marthe - après avoir tenté de la corrompre lors d’une visite nocturne. Mais c’est que cette cruche n’est pas n’importe quelle cruche aux yeux de Dame Marthe. Elle a traversé les époques, les coups du sort sans que rien ne lui arrive…jamais. Il faut punir l’auteur de ce crime. Car à ses yeux, s’en est un ! La venue du conseiller de justice Walter, en tournée d’inspection dans les tribunaux de la région, va rendre périlleuse la situation de ce juge-jugé. Une maudite arrivée pour Adam, coupable de péché mortel, au-dessus de la tête duquel semble flotter une épée de Damoclès. Epée d’ailleurs symbolisé par trois poutres de tailles différentes qui ondoient sans cesse au-dessus du plateau, comme une sentence prête à tomber. La cour se transforme lentement en véritable cirque où le juge épuisera tous les subterfuges possibles pour s’innocenter. Le jeune paysan Ruprecht, vulgaire mais amoureux de la fragile Eve, fera les frais des efforts démoniaques mis en place par celui-ci pour se disculper. Des arguments cocasses, loufoques, souvent sans queue ni tête, qui entraînent indéniablement le spectateur dans une jouissive jubilation. A cour d’inspiration dans son plaidoyer, Adam sera peu à peu découvert, ne pouvant cacher ses blessures et son pied-bot, preuves de sa culpabilité. Cette farce folle aux personnages bien définis et affirmés, s’achève sur un plateau devenu pénombre où Dame Marthe reste là, statique et larmoyante en s’écriant « Ne faut-il pas que justice soit rendue à ma cruche ?! »…Celle-là même qui n’a rien compris au drame qui s’est joué, offre avec un irrésistible humour toute sa place au double sens attribué au mot « cruche » !
Derrière une bouffonnerie de bon aloi, se cache un tête à tête vétilleux et impertinent entre les deux justices – celle de dieu et celle des hommes - et l’auteur du péché. Un procès où Adam et Eve, personnages centraux, procèdent à un véritable jugement de l’humanité. L’homme y est présenté comme sinueux et immoral, la femme comme une victime des travers de celui-ci. Une farce où finalement, Adam et Eve, les deux croqueurs de pomme se retrouvent face aux mêmes contradictions. Celle des bonnes mœurs de l’époque et celle des désirs personnels. Un thème qui prête encore à méditation aujourd’hui…
Sans surprise, cette pièce du dramaturge Allemand Heinrich von Kleist a outré l’opinion lors de sa parution en 1805. Elle est la première pièce de son Œuvre. Un ouvrage inachevé par un décès prématuré – il s’est suicidé avec sa femme à l’âge de 34 ans – où il laisse néanmoins à la postérité huit pièces dont une inachevée. Des œuvres paradoxales, ambigües et bien souvent provocatrices pour un auteur en quête d’absolu. Un absolu qui le conduira à accompagner sa femme dans la mort et choisir en guise d’épitaphe « Maintenant, ô immortalité, tu es toute à moi ! » - vers tiré de sa dernière pièce Le Prince de Hombourg. Sa constante tentative du dépassement et son éternelle dualité entre subjectivité et réel installeront ce maître de l’entrelacement entre l’infini et la barbarie comme un auteur dans la droite lignée de Shakespeare. A raison certainement…

dimanche 7 octobre 2007

Face de cuillère

De Lee Hall, texte français de Fabrice Melquiot, mise en scène de Michel Didym. Avec Romane Bohringer.

Samedi dernier, dans la soirée du 06 octobre, c’est une étonnante petite fille qui occupait les planches du Théâtre du Jeu de Paume, à Aix-en-Provence. Cette singulière gamine, c’est Face de Cuillère ou Steinberg de son vrai nom, mais personne ne l’appelle plus comme ça. Au périlleux exercice que celui de jouer une enfant malade, c’est Romane Bohringer qui s’y est attelé, avec audace, générosité et sensibilité sans jamais tomber dans le pathos ou le larmoyant dans cette histoire pourtant tragique.

Un Etre hors du temps

Face de Cuillère, c’est une petite fille sans âge chez qui tout va de travers. Une enfant condamnée dès sa naissance à porter ce drôle de nom en raison de son étrange frimousse ronde. Toujours ailleurs et disposant de facultés « géniales », elle est une sorte de mystère sans réponse que les docteurs qualifient d’autiste. Elle qui pourtant a tant de choses à nous dire, à nous apprendre. Imitant tour à tour sa mère, vouant un culte à la vodka et son père qui se saoule, lui, des effluves du corps d’une étudiante - elle se moque de ce monde d’adulte. Elle qui est à la fois, une gosse, une ado et une femme. Une gosse qui émeut par son langage enfantin, familier, brut et qui nous sert des évidences avec la joie d’ingénieuses découvertes. Le temps ne semble pas effleurer celle que le cancer condamne pourtant à une courte vie. Face de Cuillère n’évoque les faits que dans l’approximation : « Il y a un bail »…comme si le temps devait être oublier. Elle est une incroyable leçon de philosophie. Elle, qui traite du beau, de la religion, de la maladie, de la mort avec ces tics langagiers typiques des adolescents : « Et tout ça », « Tu vois le truc ? ». Face de Cuillère c’est une sacrée môme que la vie n’épargne pas mais qui affronte son destin avec une maturité démente. Une sorte d’Antigone des temps modernes convaincue que « Les choses les plus tristes ça te remplit à fond ». Une adoratrice de La Callas et des chanteuses d’opéra qui finalement s’éteindra en musique, comme elles, ces grandes dames aux bustes prégnants...

Une formidable leçon de vie

Le spectacle s’étire sur plus d’une heure et Face de Cuillère nous prend comme confident, à moins qu’elle ne s’adresse à un ami imaginaire. Quand bien même, elle nous tutoie... Elle est proche et lointaine dans ce décor intimiste et minimaliste. Un décor ou la froideur des couloirs d’hôpitaux se mêle à l’intimité de ce monde intérieur symbolisé par un fond de scène parsemé de nuages. Un univers de « grand » où celui de l’école est tout juste matérialisé par un bureau qui tourne le dos au public, comme si l’école était déjà si loin pour elle. Car nous avons beaucoup à apprendre de cette gosse. Elle qui a compris « qu’il n’y a qu’une chose absolument sûre c’est que l’on est sûr de rien » et « qu’être différent c’est être soi ». C’est une môme avec des questionnements d’adultes qui, dans son malheur, reste convaincu de la beauté de la vie. Parce-que « peu importe comme on meurt, c’est quand même magnifique d’être vivant », tu vois le truc ? Elle a compris que le plus important est de trouver l’étincelle qui donne du sens à tout ça, à ce que l’on nomme la vie. Cette étincelle que même la mort ne peut enlever…notre monde intérieur, notre imagination. Ce « papillon » comme l’appelle si justement Jean-Dominique Bauby dans son livre « Le Scaphandre et le Papillon ». Elle nous prouve que les petits enfants sont bien plus courageux que les grands. Car pourquoi avoir peur de partir alors que l’on n’a pas eu peur de venir ? « Dans la mort, plus rien n’est séparé. On est tout, et c’est rien ! »

Une Romane Bohringer pudique et juste

Dans ce rôle difficile d’enfant malade, où elle se lançait pour la première fois dans l’expérience du monologue, Romane Bohringer est magnifique. Dans son jogging rouge, son bonnet enfoncé jusqu’au bas des oreilles, elle est expressive, fragile, réservée et infiniment juste. L’émotion toujours au bord des yeux, elle avance sereine jonglant habilement avec mélodramatique et humour. Une prouesse de comédien qui vient enjoliver le texte déjà saisissant de l’auteur anglais Lee Hall, traduit ici par Fabrice Melquiot. Dans cette mise en scène dynamique où l’heure passe comme sa moitié, le spectateur est ému par cette force de la nature qu’est Face de Cuillère. On y apprend à parler de la maladie et de la mort avec beaucoup d’ironie et à voir la vie pour ce qu’elle a de meilleur à offrir. « Dans le ménage, je laisserai tomber les étagères où l’on ne va jamais voir » nous dit Face de Cuillère. De cette œuvre théâtrale contemporaine, on ressort empli d’une irrépressible joie de vivre. Conscient que dans la vie, il ne faut donc pas s’encombrer de choses qui ne font qu’éteindre nos étincelles…

dimanche 30 septembre 2007

L’Odyssée du Danube – septembre 2007

Il y a des expériences qui nous confrontent de plein fouet à l’incommensurable limite des mots, s’il en est une, je vous présente l’Odyssée…

Un rêve de gosse

L’Odyssée du Danube, troisième volet d’une biennale débutée en 2001 à l’initiative de l’Institut International du Théâtre Méditerranéen, s’est achevé le 15 septembre dernier après quinze jours de navigation entre Vienne et Bucarest. Quinze jours durant lesquels la vieille Europe et les nouveaux entrants que sont la Bulgarie et la Roumanie ont été rassemblé par l’intermédiaire des arts. Quinze jours d’une épopée épique qui nous a amené dans les grandes cités Slaves - Vienne, Bratislava, Budapest, Belgrade, Svishtov - jusqu’à proximité de la mer noire avec la Roumanie. Parmi les quelques cents personnes embarquées à bord, saltimbanques de tout pays – journalistes - hommes de lettres ou politiques, me voici donc, enthousiaste, émerveillée et emplie de la conviction qu’être ici est une chance. Le périple ne viendra que confirmer ce pressentiment. Quel meilleur message en effet que celui de paix à l’heure où la guerre ronge, parfois en silence, certains pays. A l’heure où la bêtise humaine enfle au péril de trop nombreuses vies. Le Theodor Körner, navire fluvial sur lequel nous allons embarquer, est un bateau pour la paix, un vaisseau lumière dans une société fantôme qui porte en lui l’espoir d’un avenir meilleur. Un avenir où l’Homme serait réconcilié avec lui-même et où l’humanité reprendrait sa place centrale pour une intercompréhension entre les peuples…

Plus qu’un drapeau, un symbole

Une première soirée s’est écoulée où chacun a pu prendre ses repères dans les couloirs du Theodor. Ca y est, le départ est proche et tout le monde se presse sur le pont pour observer ce symbolique instant. Après un solennel discours de Richard Martin, directeur du théâtre Toursky, instigateur de ce projet et maître des lieux, le drapeau arborant le message « Un bateau pour la paix » se hisse lentement et en musique à l’avant du navire tandis que celui-ci prend le large. Aurevoir Vienne…Bonjour le Danube…Nous voguons à présent en direction de la Slovaquie. Cette cérémonie passée, l’aventure pouvait commencer forte de son message fraternel et emplie d’un doux effluve de paix qui semble déjà envahir les participants. L’atmosphère n’est que quiétude et chaleur humaine, chacun se parle, se regarde, s’interroge…s’apprivoise. Dans le Panoramic Bar, cet espace cossu affichant sièges en cuir, décorations florales et moquette estampillée « TK » pour Theodor Körner et non pas pour Toursky – fabuleux hasard que le metteur en scène Wladyslaw Znorko ne manquera pas de relever - chacun prend sa place et ce lieu se transforme vite en un univers surréaliste où se chevauchent toutes les langues dans un rocambolesque brouhaha. Français, anglais, espagnol, arabe, allemand, roumain et j’en passe…Comme dirait le rappeur Soprano, nous sommes entrés en « Cosmopolitanie ». Chacun prend ainsi peu à peu sa place ; leader ou suiveur, expressif ou timoré, acteur ou spectateur. Comme une micro société, rassembler des humains dans un bateau pendant des jours constitue un véritable laboratoire d’étude des comportements. Mais fermons cette fascinante parenthèse ! Dans cette ambiance bon enfant, ce navire fluvial, cet inconnu, va se transformer en quelques heures en véritable antre familiale où chacun semble se sentir à son aise. Et ça n’était que le début…

L’art pour l’échange entre cultures

C’est donc dans cette apaisante ambiance que le périple continua, de minutes en minutes, d’heures en heures, de jours en jours…Car il faut savoir qu’ici le temps avait perdu sa montre. Les heures se métamorphosaient en minutes et les minutes en secondes, comme si le bonheur se voulait toujours trop fuyant, trop fugace ! Même les jours avaient perdu leur ordre…Mais quel jouissif abandon que cette perte de repères ! Nos escales étaient rythmées - plutôt trop que pas assez d’ailleurs - entre les représentations de nos artistes embarqués et les cadeaux culturels que nous offraient nos accueillants. C’est ainsi que nous eûmes droit à des instants d’une émotion si forte qu’on peut parler ici d’instants d’éternité. Le spectacle de Richard Martin, Marie-Claude Pietragalla, Julien Derouault, Didier Lockwood et Caroline Casadesus autour de l’enivrant texte de Léo Ferré « La mémoire et la mer ». Une performance où se mêlent avec une symbiose ultime la poésie, la musique, le chant et la danse, donnant au texte encore plus de corps. Ou bien encore au travers des « flammes du désir », spectacle pyrotechnique dansé proposé par Raymond Laub du groupe F et la danseuse Chimène Costa, au sein duquel la femme est sublimée pour devenir l’icône de l’infinie sensualité. Mais aussi, « Rubayat » mis en scène par Maïa Morgenstern qui incarnait il y a quelques mois Marie, mère de Jésus, dans « La passion du Christ » de Mel Gibson. Elle nous présentait ici, accompagnée de son fil Tudor Istodor, cette pièce tragique du philosophe-poète Omar Khayyâm. Cette œuvre tourmentée qui nous entraîne comme un tourbillon dans nos questionnements, nos angoisses les plus profondes. Quelle est ma place dans l’univers ? Pourquoi suis-je ici ? Pourquoi dois-je mourir ? Autant de spectacles pour autant de moments de partage entre les saltimbanques, ces « Odysséens », et les autochtones des différentes contrées traversées. Entre culture du sud et du nord, de l’ouest et de l’est, entre humains tout simplement…

De ces lieux où l’on se promet de revenir…

Les jours se succèdent et au hasard des escales, il y a des lieux qui nous bouleversent. Des lieux où une remise en question, une remise en place de la pensée s’impose. C’est ce que j’ai ressenti, éprouvé même comme une blessure en entrant dans Belgrade et comme un enchantement en foulant l’herbe trempée du port culturel de Cetate. Entrer dans Belgrade (Beograd en serbe translittéré signifiant la ville blanche) procure une bien étrange sensation…C’est à la fois un plongeon direct, sans concession, dans les horreurs de l’histoire et une confrontation avec une pauvreté omniprésente à laquelle se mêle la sensation de voir se dérouler devant nos yeux les images vieillies d’un film en noir et blanc. Belgrade est une de ses villes où la classe moyenne n’existe pas. Quel choc que de voir des murs portant encore les traces de balles, de passer à côté de bâtiments éventrés par les bombes et les noirceurs des anciens feux de haine…De ces anciens feux de la bêtise humaine – qui ne se sont toujours pas éteints. La télévision banalise les images de violence au point que nous en oublions la réalité qui, ici, nous rattrape vite, nous devance même. S’il est bien un endroit où l’Odyssée devait faire escale s’est ici, auprès de ce peuple meurtri qui porte, plus de dix ans après, les stigmates de la guerre. Insécurité nocturne voire diurne, contrôles draconiens des étrangers et méfiance de la part des serbes planent ici, comme si l’éminence de nouveaux affrontements était effective. Belgrade est la ville des contrastes, des paradoxes où les rues marchandes occidentalisées jouxtent les anciennes rues de la ville dévastée, et où les jeunes femmes au look européen côtoient des mendiants aux traits tirés…Après trois jours passés au cœur de cette ville, le cœur gros et l’âme torturée par les visions auxquelles renvoie cette escale, je quitte Belgrade en me promettant d’y retourner. Notre voyage continue en direction de la Roumanie. Pays qui allait nous offrir un fabuleux trésor…Cetate. Cetate a été l’escale mémorable pour l’ensemble des « Odysséens ». Un véritable paradis sur Terre où nous sommes arrivés sous une pluie battante, dans cette sorte de brouillard accompagnant souvent la rive des fleuves par temps de pluie, de ces embruns qui renvoient à des univers enchantés, peuplés d’elfes et de bonnes fées. Ici, ça n’était pas des fées qui nous accueillaient mais de généreux musiciens Tziganes qui jouaient des airs traditionnels sous cette terrible averse, le sourire jusqu’aux oreilles. Quel fantastique accueil, surréaliste même ! Nous débarquions dans la propriété du poète Mircea Dinescu, personnalité Roumaine bien connue ayant échappé de peu à la mort sous le régime de Ceausescu. Cet endroit perdu quelque part sur une rive du Danube, niché au cœur d’une forêt dense où réside de temps à autre des artistes, où les animaux sont légion et où l’amour règne en maître. Un « no man’s land » du bonheur où le temps s’est arrêté, où le premier distributeur de banque est à 30 kilomètres. Un « ailleurs » indicible où un port a même été crée pour l’occasion alors qu’aucun bateau n’avait accosté ici depuis 50 ans. De l’abyssale limite des mots je ne disserterai pas, elle est effective…ici.

Un véritable laboratoire artistique mouvant

Ce sont de ces rencontres fraternelles, de ces lieux uniques, de ces moments partagés que les artistes se nourrissaient pour enrichir les créations de ce laboratoire artistique. Car le Theodor Körner était bien un lieu d’expérimentation où une ambiance onirique venait nourrir les âmes créatrices. Musiques du monde avec l’Orchestre International qui, à chaque escale, proposait son concert, toujours plus étoffé dont les airs ont d’ailleurs envahi nos têtes jour et nuit pendant et après le voyage. Mais aussi, le marathon de la poésie où tout un chacun pouvait venir lire des textes de théâtre, des poèmes…Une rencontre quasi quotidienne qui va donner naissance d’ici quelques mois à une anthologie de la poésie. Ce laboratoire flottant a véritablement fait voguer les âmes et révéler les essences créatrices pour que la musique résonne jusqu’au bout de la nuit, lorsque les novices improvisent avec les musiciens confirmés pour créer et rêver toujours plus, sans limite…Le dramaturge Eugène Ionesco avait bien raison : « Les idéologies nous séparent, mais rêves et angoisses nous rapprochent »…

Fraternité n’est pas qu’un mot

La descente du drapeau dans la nuit du 14 au 15 septembre scelle la fin de l’aventure. Symboliquement l’Odyssée, notre Odyssée de l’humain s’achève ici, maintenant… En cette heure tardive sur ce pont que le vent de la nuit vient rafraîchir, le Theodor Körner songe déjà à son quai d’amarrage. L’émotion est grande, outrancière même et me pousse alors au retranchement. En cette dernière soirée, le Panoramic Bar, le salon de notre nouvelle demeure, nous accueille une dernière fois pour nous offrir un ultime moment de délicieuse fraternité. Nous sommes à Giurgiu en Roumanie, notre dernier port d’attache et nous rejoindrons demain Bucarest d’où nous nous envolerons pour rejoindre nos contrées respectives. Quinze jours se sont ainsi écoulés sur ce bateau devenu, le temps d’un doux rêve, notre maison. Quinze jours entre partout et nulle part. Dans un ailleurs qui n’existe qu’ici, entre ces deux rives du Danube, sur ces eaux magiques, à la fois calmes et tourmentées – généreuses et secrètes qui nous ont transporté aux confins d’un univers utopique, enchanteur et enchanté, qui a sans nul doute réveillé nos cœurs endormis par cet individualisme grandissant. L’Odyssée est un pays sans frontières où toutes les barrières sont levées. Main dans la main, bras-dessus bras-dessous, ceux qui ne se connaissent presque pas s’enlacent déjà dans un tourbillon d’amour fraternel, les yeux rêveurs et le sourire aux lèvres. L’Odyssée du Danube est un Odyssée du cœur, un univers mouvant et sans limite où se rejoignent en chœur tous les possibles ! Inopinément et de manière insoupçonnée, cet Odyssée a révélé une humanité méconnue et bouleversante. Fraternité, partage entre culture, joie de rencontrer cet autre finalement si semblable…j’y croyais comme on croit en un doux rêve…maintenant je le sais, l’Odyssée est un chamboulement qui change irrémédiablement le rapport à l’autre et le regard sur l’humain. Fraternité n’est pas qu’un mot, elle se ressent, se vit, se partage comme un nouveau souffle vers l’éventualité d’un avenir meilleur…

dimanche 2 septembre 2007

Première foulée pour le marathon de la poésie

La course est enfin lancée…Une première réunion s’est effectivement tenue, aujourd’hui, au centre culturel de Hainburg, à proximité de Vienne en Autriche. La « Fabrique à culture » (Cultural Fabrik) et Piero Bordin ont reçu l’ensemble des poètes, poétesses et comédiens embarqués à bord du Theodör avec tous les hommages et leur amitié. Dans ce nouveau lieu de la culture en Autriche, les premières pierres ont été posées et scellées dans un élan de fraternité.
Ce marathon, véritable chevauchée poétique, permettra à n’en pas douter aux saltimbanques de faire découvrir les textes de Méditerranée et d’Europe qu’ils portent haut et fort dans leur cœur. Avec partage, fraternité et sensibilité comme maître mot, l’échange poétique interculturel s’annonce artistiquement et humainement riche. Que les frontières politiques, institutionnelles et culturelles s’abattent sous les vers de nos artistes des mots. Que le pouvoir de la rime résonne dans les esprits et les cœurs jusqu’au bout du périple et après…pour la paix et l’amour entre les peuples.

vendredi 31 août 2007

Quelque part au-dessus de la Terre...

C’est ici que tout commence…Enfin, ça y est nous sommes partis, il est 13h nous nous apprêtons à survoler la Suisse. Premier vol en avion et une incroyable impression de flotter au-dessus d’un champ de coton ou de voir se dévoiler sous mes pieds un paysage recouvert d’une épaisse pellicule de neige dont seules les montagnes viennent ôter la virginité.
Si les nuages peuvent symboliser l’univers du rêve et de nos désirs les plus profonds, ce trajet qui me conduit vers l’Odyssée du Danube commence donc symboliquement dans les airs…
Face à cette immensité nébuleuse, ma première pensée est que nous ne sommes vraiment que des pions…Perdue en plein air, survolant tour à tour les plus hauts sommets des Alpes, le lac de Zurich et les grandes étendues verdoyantes du sud de l’Autriche, on devient à la fois tout puissant et bien peu de chose. Un pion lancé dans l’air et abandonné aux caprices de la nature et de la technique créée des mains de l’Homme…en ce jour de départ pour un rêve, cela me semble aussi effrayant que superflu.
Je ferme les yeux et m’imagine alors hors de cette carlingue. Je flotte librement et trace mon chemin à travers les routes, célestes et sinueuses, que dessinent les nuages. Telle une face cachée, secrète, mystérieuse et insoupçonnée de la planète Terre, ce paysage qui s’offre à moi semble clandestinement habité. Par qui ? Par quoi ? Certainement par la poésie de la nature qui, laissée à sa propre expression, semble dire beaucoup…Dieu que c’est beau la Terre vue du ciel !

mardi 21 août 2007

"Vie en kaleidoscope" reprend vie...

Non, non...Je n'ai pas abandonné mon blog! Celui qui me permet d'écrire comme je veux, comme je peux, reprend du service en cette soirée d'août!
Il s'en est passé quelques semaines sans avoir le temps d'écrire le moindre mot et comme à l'accoutumée, cela commence terriblement à me manquer...
Prise et éprise par le projet Odyssée du Danube sur lequel je m'attele depuis maintenant plus d'un mois, le temps m'a manqué pour venir enrichir mon "p'ti média". Mais c'est promis je suis résolument de retour!

Le périple sur le Danube approche donc puisque nous partons dans dix jours maintenant. Mon dieu que l'excitation est grande! Je me sens presque comme une enfant qui ne trouve pas le sommeil la veille de nöel! Les préparatifs s'accélèrent et le projet a bien pris forme...Beaucoup de travail, d'acharnement (de fatigue aussi)...mais surtout beaucoup de fierté finalement de contribuer et participer à un tel projet, incommensurablement riche sur le plan artistique et humain. Dans la masse de travail que l'Odyssée représente, je n'ai pas oublié la beauté de cette initiative fraternelle et surtout que sans certaines personnes, je ne serais pas de la partie! Alors encore une fois...Merci!

Au fil des escales, j'essaierai donc de vous retranscrire mon quotidien sur le bâteau, mes ressentis, les temps forts, les rencontres...Comme un carnet de bord, j'essaierai de vous faire vivre ce qui sera pour moi une expèrience résolument unique. De celles qui restent à tout jamais gravées dans l'esprit, dans le coeur. Une aventure qui, à n'en pas douter, viendra nourrir mon âme, modifier ma vision de l'humain et ouvrir toujours plus le champ des possibles...

jeudi 5 juillet 2007

Le caméléon Nosfell envoûte Le Poste à Galène

Labyala Fela Da Jawid Fel, plus communément appelé Nosfell, artiste éclectique et mystérieux, âgé d’à peine 28 ans s’est déjà incarné comme un guitariste hors pair et comme une emblème de la nouvelle scène rock alternatif Française. Le 27 juin dernier il était parmi nous à Marseille, venu envoûter les planches du Poste à Galène…

Un univers fantasmagorique

Nosfell, fils de Lugina, l’une des sept forces de l’île de Klokochazia, est un Être des plus atypiques. Une véritable énigme qui fait de lui un musicien à l’aura démentielle. A chaque concert, à chaque nouvelle chanson, il nous entraîne dans son univers psychédélique perdu dans les contrées du pays de Klokochazia. Klokochazia, cette île entourée de plusieurs petits îlots, bouts de terres non gérés par des hommes, mais par leur propre histoire. Cette histoire prend vie sur scène, au travers des paroles de Labyala Nosfell, « celui qui marche et qui guérit ». Car Nosfell est autant chanteur que conteur. Et ce n’est pas sans plaisir que le public se délecte des intermèdes narratifs qui escortent ses chansons. Ses chansons où le Klokobetz, langue de Klokochazia, se mêle allègrement à l’anglais et au français. « On n’y comprend rien », diront peut-être certains. Mais l’important n’est pas ici de comprendre, mais de percevoir et de s’approprier comme l’affirme l’artiste. Un univers où l’imaginaire de chacun peut donc résonner en toute liberté.

Une « bête » de scène

Mais Nosfell n’est pas qu’un chanteur…Aussi habile avec sa voix, ses instruments que son corps, il est une véritable bête de scène qui captive partout où il passe. Lui qui a d’ailleurs déjà fait les premières parties de Tryo ou bien encore des Red Hot Chili Peppers. Véritable caméléon vocal déambulant sur scène tel un reptile, il impressionne autant qu’il peut faire peur. Sa voix tantôt virile peut, le temps d’un accord, se muer en voix féminine ou enfantine. Capable d’enchaîner vocalises d’une finesse époustouflante et cri guttural au son de la guitare…Est-ce que cette voix sort bien de ce corps ? Pourrait-on se demander tellement ces mutations lui semblent aisées. Dans cette valse sonore, on passe de paroles slamées à du beat box pour revenir à un rock, puissant et féroce. La musique de Nosfell, tel un tourbillon, se vit et transcende. Maître de « l’auto-sampling », il boucle ses voix et les instruments en direct pour une expérience acoustique toujours renouvelée. Non décidemment, ce drôle d’animal venu d’une étrange planète mérite bien les applaudissements qu’il récolte…

Vous pourrez redécouvrir ou découvrir cet artiste hors norme lors des nombreuses scènes qu’il va ensorceler à partir de cet été. Retrouvez toutes ses dates sur son myspace : http://www.myspace.com/nosfell

Max Black : un concerto pour explorateur effréné

Hier soir encore, le festival de Marseille nous offrait un de ces joyaux du théâtre contemporain aussi saugrenu qu’ingénieux au travers du nouveau spectacle de Heiner Goebbels, Max Black. Heiner Goebbels, celui-là même qui nous exposait l’an passé Eraritjaritjaka reçu alors avec succès, en remet donc une couche aux côtés de son acteur fétiche André Wilms. Embarquement pour un peu plus d’une heure dans le cerveau black de Max…

Une machinerie de l’esprit

Max Black, scientifique Russe ayant réellement vécu, est la trame de ce système tortueux offert à nos sens. Non seulement à la vue, mais aussi à l’odorat, l’ouïe…le toucher presque. Max Black est une machinerie de l’esprit élégamment portée par les écrits de Paul Valéry, Ludwig Wittgenstein et Georg Christoph Lichtenberg. A la question : Que fais-tu tout le jour ?, Paul Valéry répondait : « Je m’invente » et Max Black, en philosophe pyromane, s’invente au fil de sa mathématique visionnaire, de ses lectures et de sa machinerie infernale, véritables stigmates de sa pensée alambiquée. Max est une sorte de génialissime professeur fou, enfermé dans son laboratoire aux allures invraisemblables d’un vivarium, de cabaret des 50’s et d’un entrepôt abandonné. Affairé à la recherche de la vérité universelle, il enchaîne ses réflexions à une rapidité démentielle, les mots fusent, filent et s’enfuient. Témoins des entrelacements de son âme et de sa pensée psychédélique. « Je fais tout vite ou je ne fais pas » nous confie t-il. Tel le feu, la pensée de Max Black est fugace, insaisissable car « La nature a horreur du vague ». Les choses n’existent que dans l’immatérialité, l’instantané…et là se trouve les secrets du monde et les mystères de l’Homme.

Un engrenage bien ficelé

« Max Black c’est assez rock’n roll » concède donc André Wilms, oui mais un rock dont les pas sont comptés. Tout dans cette machinerie déstabilisante est orchestré avec génie et dextérité. Des sons énigmatiques, aux effets de lumière en passant par les diverses animations pyrotechniques, tout est synchronisé à la seconde près. Avec Heiner Goebbels comme maître d’œuvre tout s’anime comme par enchantement, les paroles, les objets, les feux, les ombres et les sons. Ces sons, tantôt fait de bric et de broc en frottant un archer sur le bord d’un vinyle, tantôt rappelant l’atmosphère anxiogène des films de Kubrick, nous entraînent dans le bouillonnement de Max. Les carreaux lumineux s’allumant de temps à autre au sol, véritable échiquier à taille humaine, venant certainement nous rappeler que nous ne sommes que des pions et que la vérité universelle, telle le feu, est pour nous imperceptible. Sur ce plateau désordonné, qui finalement ne l’est pas tant, André Wilms a littéralement mis le feu aux planches, au sens propre et figuré. Heureux de profiter de la liberté formelle que lui offrent les œuvres de Goebbels, il met visiblement tout son cœur à l’ouvrage. Nous regretterons juste l’utilisation du micro, dont la nécessité peu avérée altère la voix du comédien et par la même le réalisme du ton. Mais dans les rouages d’un spectacle aussi bien mené, il faudrait bien plus pour mettre de l’huile sur le feu…

mercredi 4 juillet 2007

Dawta Jena & Urban lions célèbrent la musique

Une petite vidéo de Dawta Jena & Urban Lions, groupe dont vous pouvez toujours retrouver l'interview de Jena, leur leader, dans la rubrique du mois d'avril. Cette séquence de concert prise lors de la fête de la musique, vous donne un avant-goût de la chanson phare de leur nouvel album Halleluhjah...N'hésitez plus, il est dans les bacs!!!

mardi 3 juillet 2007

Tosca : de Rome à Peynier

Pour cette deuxième édition des Nuits musicales de la Sainte-Victoire, le village de Peynier a reçu six soirées avec un point d’orgue les 28 et 30 juin lors de la représentation de Tosca en version de concert, Eve Ruggieri dans le rôle de récitante. Un moment magique dans un décor aussi mystérieux qu’envoûtant…

Un théâtre hors pair

Une forêt énigmatique dans les hauteurs du pays d’Aix, une forêt dense au pied de la montagne Sainte-Victoire, cet amas rocheux qui a inspiré tant d’artistes. Et là, posé en plein milieu un théâtre de verdure, orfèvrerie paysagère qui opère la rencontre entre l’art et la nature. Les Nuits musicales de la Sainte-Victoire, ce tout jeune festival, c’est la rencontre de l’art lyrique et d’un lieu atypique. Un de ces endroits où l’on s’attend à voir une fée clocheter derrière le tronc d’un arbre centenaire, un de ces endroits où le talent est forcément au rendez-vous. Séduit par ce projet atypique Christian Burle, maire de Peynier, a alors mis tout son enthousiasme dans sa réalisation. Et cette année, Eve Ruggieri, personnalité du petit écran qui a voué sa carrière à la découverte de la musique est venue soutenir le projet. Cette voix coutumière, pour les épris de grandes œuvres lyriques, est venue nous conter l’histoire de Tosca tandis que l’orchestre de l’Opéra national de Lviv en Ukraine et son chef d’orchestre Grigori Penteleitchouk débarquaient en France pour nous offrir tout leur talent.

A la découverte de jeunes talents

A leurs côtés, de jeunes talents, déjà connus ou en voie de le devenir. Une occasion unique pour eux de partage avec le public dans cette atmosphère qui se veut intimiste. Une première Tosca même pour le cadet de notre quatuor, Andeka Gorrotxategi-Azurmendi. Un jeune espagnol de 29 ans à la tessiture de ténor, casté il y a quelques mois par Eve Ruggieri au Cnipal (Centre national d’insertion professionnelle d’artistes lyriques). Une voix rêvée pour ce rôle de Mario Cavaradossi, peintre dont la cantatrice Floria Tosca est éprise. Car la Tosca de Giacomo Puccini, c’est tout d’abord une histoire d’amour à mort. Un amour impossible qui mènera la cantatrice Tosca jusqu’au suicide. Tosca, opéra en trois actes, créé le 14 janvier 1900 au Teatro Costanzi à Rome et troisième œuvre de l’artiste Puccini constitue la première tentative qui relève du Vérisme. Le Vérisme, ce mouvement artistique Italien de la fin du XIXème qui rejetait tout idéalisme. Ainsi, de Rome à Peynier, un siècle d’histoire plus tard, Mario Cavaradossi et Floria Tosca (Adina Aaron) ont enthousiasmé le public de ce théâtre de verdure par la puissance et la justesse de leurs voix. Seul un Imer Katcha avec une voix un peu affaiblie, dans le rôle du baron Scarpia, a alangui la performance. Mais dans ce lieu surprenant, véritable invitation au lyrisme, la musicalité de l’œuvre de Puccini et le talent partagé l’ont néanmoins emporté. Nous souhaitons donc de longues années d’existence à ce festival qui se veut un appel à la découverte de l’art lyrique avec un prix d’entrée unique de 20€.

lundi 2 juillet 2007

Konnecting Souls

L'an dernier, Franck II Louise proposait 1st Konnexion dans le cadre du festival de Marseille, un spectacle reçu alors avec succès par le public. Pour cette douzième édition du festival, le danseur et chorégraphe a transformé l'essai avec Konnecting souls présenté au parc Henri Fabre. Un spectacle "ovni" utilisant avec brio le talent des danseurs et les potentialités offertes par les technologies numériques.

S'éloigner du hip-hop pour mieux l'étudier

Franck II Louise, aujourd'hui installé à Marseille, est un pionnier de la scène hip-hop en France. D'abord danseur, il s'adonne rapidement à la composition musicale en tant que DJ et créera des musiques pour les plus illustres compagnies hip-hop. Se lançant dès 1998 dans la création chorégraphique, l'envie de lier ses deux passions que sont la danse et la musique s'imposera naturellement d'elle même. Cette singulière envie devenue forte obsession ne le quittera plus. S'éloignant alors de la culture hip-hop dont il est issu, il entamera ses recherches en tant que chorégraphe. Ses deux premières compositions Instinct Paradise et Drop It, où le maître II Louise sera à la fois chorégraphe et compositeur, seront un véritable succès et pousseront l'artiste à expérimenter plus encore l'alliance du mouvement et du son. "Un corps qui danse est un corps qui chante, mais muet. J'avais besoin d'entendre plus que ça" déclare celui-ci. A ce désir d'une plus grande musicalité du mouvement, les technologies numériques sont venues rendre un fier service. Six ans de recherche avec l'IRCAM (l'Institut de recherche et de coordination acoustique/musique) ont néanmoins été nécessaires pour mener à bien cette aventure hors du commun où danse et musique sont en parfait équilibre. Les différents capteurs en place et le geste devient note. Un système qui n'est pas novateur puisque des tentatives ont été expérimenté par d'autres danseurs, chorégraphes ou performeurs, mais un projet mené avec conviction et à la sueur de leurs fronts après des heures de réglages pittoresques et de répétitions pointilleuses.

De l'animalité à l'humain androïde

Dans ce spectacle irrémédiablement singulier, Franck II Louise nous propose un humain à la fois animal et robot. Bestial dans ses déplacements au ras du sol, déambulation proche de celle du singe. Robot par l'arsenal de câbles et de capteurs qui recouvrent la peau de ces danseurs. Une dualité abordée avec audace dans cette pièce qui offre une conception nouvelle de la danse hip-hop. Une conception bien éloignée du hip-hop tel qu'il est né dans les ghettos noirs New-yorkais, comme une danse qui mêle aspects festifs et revendicatifs. Ici Franck II Louise se sert du hip-hop pour sublimer les corps et pour qu’ils se transforment en véritables human beat boxes. Equipés de capteurs de mouvements, les quatre danseurs créent les sons en temps réel pour un rendu époustouflant, voire invraisemblable dans les premières minutes de représentation. Les sons créés s'apparentent alors à de vraies mélodies, à du beat box ou bien encore à des bruits que l'on croirait sortis de la bouche de primates. Un spectacle impressionnant tant sur le plan artistique que technique où les danseurs sont au sommet de la maîtrise de leurs corps. Pas un faux pas, pas une fausse note! Littéralement embarqué sur un vaisseau ovni, le public ne voit pas passer l'heure de spectacle. Dans l'univers du maître II Louise, le temps a perdu sa montre et l'homme est devenu mutant, à la fois tout puissant sur son art et rendu à son état primaire. Danse et théâtre se mêlent donc dans ce rendez-vous chorégraphique d’un nouveau type où la recherche ne se limite pas la danse mais aux thématiques abordées. Konnecting souls, pour des âmes connectées...Entre elles? Avec les corps et la musique? Avec le public? Dans cet univers inédit et surprenant oscillant entre celui du reportage animalier et celui de Matrix, à vous de choisir...

crédit photo : Agnès Mellon

dimanche 1 juillet 2007

L'important c'est d'aimer...

Il y a des périodes où l'encrier est vide et d'autres où les idées fusent et nous assaillent sans prévenir, en voici une...Une qui m'a surpris et a jailli dans ma tête dimanche dernier dans ma salle de bain (comme ça vous saurez tout...). Une idée qui ne m'a pas laché jusqu'à cet après-midi où le temps m'a permis de lui donner vie. Envie donc de tenter d'écrire un poème avec les titres de chansons qui me touchent ou m'ont touché, des chansons qui ont jalonné ma vie jusqu'à présent. Après une petite sélection bien obligatoire, voici le résultat (sans trop de surprise finalement pour moi quant à la signification finale)...mais je vous en laisse juge. Bonne lecture!

Une lettre à France où c'est un peu la zizanie,
une lettre à une France décalée où l'on a pu mourir pour des idées.
J'accuse l'homme pressé d'avoir perdu son sixième sens,
de ne plus rêver et de ne choisir entre vivre ou survivre.
Personne ne sait où l'on ira,
mais c'est une belle journée.
Un instant suspendu dénué de temporalité.
Encore un matin ou un samedi soir sur la Terre
Et alors...Qui sait? Qui saura de quoi demain sera fait?
Moi dans ma soif de la vie, j'ai tout oublié.
Allez viens! Soyons zen...
Les copains d'abord et un zeste de courage
3 nuits par semaine et encore & encore,
même à bout de souffle on continuera en chantant...
notre chanson pour l'Auvergnat.
Souvenir d'enfance mais des souvenirs devant!
Même si de temps en temps, mon sos d'un terrien en détresse vient demander à la lune de nous souffler un mistral gagnant,
il y a des moments où l'on y peut rien.
Moi j'ai choisi de vivre et lutter jusqu'au bout de mes rêves...
Les mots dans le coeur, dans la peau comme une question d'équilibre.
Sans contrefaçon, l'important c'est d'aimer!!!

vendredi 29 juin 2007

Odyssée du Danube : Une épopée pour la paix

Cela fait un bon moment que je n'ai pas trouvé le temps d'écrire et là ça n'est vraiment plus possible...Trop énervée de ne pas prendre le temps, trop envie de revenir tapoter sur ce petit clavier! Durant ce mois de juin, dieu sait qu'il s'en est passé des choses pourtant! Mes premiers pas derrière un micro de radio, dix petits jours de vacances pour un retour aux sources et des vadrouilles deci-delà, mais surtout une nouvelle qui m'a fait hurler et sauter de joie un certain lundi de juin...

Il y a des fois où l'on a l'impression que la vie ou je ne sais quoi vous fait un énorme cadeau...et là, pour moi, c'est un peu le cas! J'aurais pu faire un simple article de présentation de ce projet d'Odyssée 2007 qui me ravit, m'enchante au plus haut point...mais je suis trop emballée, impliquée mais surtout trop reconnaissante pour me limiter à ça...Alors ce sera une présentation de projet à vous lecteur afin que vous preniez connaissance de la ferveur qui anime cette escapade poétique sur le Danube, mais aussi un article en guise de grand merci à ceux qui me permettent d'y participer! Je sais que pour les personnes qui se reconnaitront en lisant ceci, ce qu'ils ont fait n'a rien d'exceptionnel, mais pour moi sincèrement si...Merci de m'avoir appuyé et soutenu en valorisant mon travail, merci de croire en moi et de m'offrir cette chance! Plus globalement, merci de considérer autrui comme une fin et non comme un moyen ou un quelconque faire valoir, comme c'est bien trop souvent le cas! A vous qui vous reconnaissez...MERCI!!!


L'Odyssée 2007 sur le Danube est la suite logique des deux précédents Odyssée en Méditerranée de 2001 et 2003. Un véritable "prolongement légitime" comme le dit Richard Martin, directeur du théâtre Toursky, qui suit les même pistes de réflexion autour des enjeux de la création théâtrale contemporaine et sur le rôle de l'artiste à l'aube de ce troisième millénaire. Le "Theodor Koërner", navire fluvial sur lequel nous allons embarquer, accueillera ses passagers le 1er septembre et partira de Vienne le lendemain pour quinze jours de navigation jusqu'à l'arrivée à Bucarest le 15 septembre. Six pays traversés pour neuf escales au total (Vienne, Hainburg, Bratislava, Budapest, Belgrade, Turnu Severine, Cetate, Svishtov et Giurgiu/Bucarest). Neuf rendez-vous organisés entre la population locale, les artistes locaux et les saltimbanques embarqués à bord. Neuf rencontres qui se veulent humaines et fraternelles pour rapprocher les nouveaux entrants dans l'Europe des anciens de ce vieux continent, connecter l'art à l'espoir et finalement unir l'humain à l'humain dans un élan de paix et d'espérance. Voici l'engagement et le projet idéaliste de cet Odyssée. Une aventure mise en place par l'IITM (Institut International du théâtre Méditerranéen), organisme né en 1990 en réponse à l'appel prononcé par José Monleon à Mérida. Un appel qui a placé le théâtre contemporain et l'art en général au centre de notre dynamique historique actuelle quelque peu difficile. L'art comme espace de dialogue, comme une voie ouverte pour une voix collective. L'art pour sublimer nos différences et en exalter la richesse autour d'un projet commun, ou comme le dit si bien Richard Martin : "L'art [...] pour convertir en acte l'immense générosité de nos différences [...] là pour cimenter nos utopies et nos rêveries".

Un projet artistique et humain de la première heure et de la première importance à une époque où la guerre fait rage par le simple non respect de son prochain et par la non acceptation de la différence. Cette différence à laquelle la poésie et l'art veulent rendre sa superbe, bien loin de l'égoïsme de nos sociétés, pour une culture indivisible et fraternelle. Une aventure qui, par son engagement, a déjà mobilisé de nombreux partenaires mais qui a encore besoin de la contribution de ceux qui se sentent investis d'une mission similaire pour être encore mieux portée. Pour plus d'information : http://odyssee.unbateaupourlapaix.org/ ou http://odyssee.iitmfrance.org/. Par mail à iitmfrance@free.fr.

dimanche 10 juin 2007

Le Scaphandre de Jean-Do

Le Scaphandre et le papillon, film de Julian Schnabel, est enfin arrivé dans nos salles le 23 mai dernier! Sacré au festival de Cannes par le prix de la meilleure mise en scène, ce film sensible, juste et criant d"humanité n'est pas sans rappeler Mar adentro d'Alejandro Amenabar ou bien encore Je vous demande le droit de mourir de Vincent Humbert. Un film à voir d'urgence!

Un travail de longue haleine

Jean-Dominique Bauby, communément appelé Jean-Do par ses amis, a vu sa vie basculer le 8 décembre 1995. A l'époque, journaliste et rédacteur en chef du magazine féminin ELLE mais aussi père de deux enfants, il est victime du locked-in-syndrom à la suite d'un accident cardio-vasculaire. Le locked-in-syndrom, terme utilisé par Plum et Posner à partir de 1965, est une pathologie rarissime qui entraîne une incapacité à se mouvoir sur l'ensemble du corps et une impossibilité à communiquer. D'où une situation d'enfermement au-dedans puisque le patient, dans la majorité des cas, reste totalement conscient de son état mais demeure emmuré dans son propre corps. Hospitalisé à l'hôpital de Berck à l'âge de 44 ans, il conserve donc toutes ses capacités intellectuelles. Ne voulant se résoudre à cet enfermement qu'il n'a pas choisi, il échafaude rapidement le projet d'écrire un livre. Ouvrage qu'il pourra réaliser lettre par lettre par le langage codé de sa seule paupière restée mobile. Un travail de longue haleine et de patience tant pour Jean-Do que pour Claude Mendibil, celle qui lui permettra de mener à terme ce projet en lui épelant plusieurs fois par jour cet alphabet dans lequel il pourra choisir ses lettres. Un alphabet mis en place par l'orthophoniste de Berck qui classe les lettres par ordre décroissant d'utilisation : E, S, A, R, I, N, T, U... C'est en novembre 1996 que le livre est enfin achevé pour le plus grand bonheur de nos deux protagonistes. "Jamais je n'aurais pu écrire une ligne de plus" avoue Jean-Do, soulagé, à Claude Mendibil. L'ouvrage paraîtra le 6 mars 1997 et Jean-Dominique Bauby s'éteindra trois jours plus tard. Ayant certainement dit tout ce qu'il avait à dire...Le Scaphandre et le papillon sera le succès littéraire de l'année 1997. Traduit dans plus de trente langues et vendu à plus de 370000 exemplaires dans le monde entier, ce livre allait bouleverser bon nombre de lecteurs.

De l'écrit à l'image

Ce fut le cas pour Julian Schnabel qui décida de le mettre en image. "La boucle est bouclée" s'écrie, satisfaite, Claude Mendibil dont l'expérience a bouleversé sa vie. Elle, recrutée alors par les Editions Robert Laffont pour son calme, sa douceur et sa patience, s'étonne aujourd'hui de devoir arpenter le tout Paris à la recherche d'une robe satisfaisant les exigences des marches Cannoises. Car le film primé à Cannes mérite bien ses lettres de noblesse. Sensible, humain, réaliste et émotionnellement juste, il évite allègrement l'écueil du pathos qui vient bien souvent alourdir cette thématique déjà difficile. Mathieu Almaric dans la peau de Jean-Do est criant de vérité dans ce rôle pourtant pas aisé. Les angles de prise de vue installent avec génie et délicatesse le spectateur à la place de Jean-Dominique Bauby. Nous devenons lui avec une réelle sensation d'étouffement, d'enfermement et d'énervement qui saisie aux tripes. En tout cas, ce fut l'effet produit sur moi...Saisissant, dérangeant, émotionnellement fort mais un film dont on ressort avec une incommensurable envie de vivre, conscient que nos petits bobos quotidiens ne sont que bien peu de choses. Comme un apprentissage forcé et cynique de la détresse...Mais comme le dit Jean-Do : "Faut-il la lumière d'un vrai malheur pour éclairer notre vraie nature?". Pour cet homme, tel un naufragé échoué sur les rives de la solitude et du silence, les mots sont à la fois tendres, ironiques, sarcastiques, désenchantés mais toujours intenses, sincères et beaux. Des mots qui vous enserrent le coeur dans un scaphandre commun mais dans lequel le papillon vous rend le sourire. Ce papillon, seule échappatoire à ce scaphandre. Ce papillon que sont l'imagination et la mémoire. De ce voyage aux confins de l'humain, de l'histoire de cet être que le destin a fait chavirer aux confins de la vie, nous en ressortons irrémédiablement touchés. Un film qui, sans pour autant tirer des larmes aux spectateurs, prête à réflexion au sortir des salles obscures. Une rencontre avec Jean-Do...pour une rencontre avec soi-même...

Pour plus d'informations :
- sur le locked-in-syndrom --> http://alis-asso.fr/
(Association du locked-in syndrome, créée en mars 1997 par la volonté et l'énergie de Jean-Dominique Bauby)
- pour lire le livre --> voir aux Editions Pocket ou Robert Laffont