dimanche 29 avril 2007

"Il y a de l'eau dans le...gaz entre le jazz et la diva"

En ce vendredi soir, me voici au théâtre Toursky pour une représentation du Jazz et la diva ayant remporté le Molière 2006 du meilleur spectacle musical aux Victoires de la musique. Ce spectacle, comme tout ceux inscrit dans le cadre du projet « Margose, invitation au voyage » a pour objectif de favoriser la mixité des cultures et de promouvoir la découverte de l’autre en cette année de fête de l’Arménie en France. Embarquement pour deux heures de pur plaisir…

Sur ce plateau dénudé où une douce lumière offre au décor une dimension sacrée, trois individus entonnent une introduction musicale faites de piano, de violon et de chant lyrique. Ce sont Dimitri Naïditch (pianiste), Didier Lockwood, violoniste aux 35 ans de carrière et Caroline Casadesus, chanteuse lyrique soprano, descendante d’une grande famille de musiciens. Didier et Caroline, époux à la scène comme à la vie, donnent d’emblée le ton du spectacle par une présentation humoristique de leur vie commune et de leur rencontre. Ce soir, c’est leur 13ème anniversaire de mariage…Comme chaque année, Didier s’apprête à offrir à sa compagne son cadeau, une treizième mélodie d’amour. Ce sera Colchique dans les prés, que Caroline ne trouve pas vraiment à son goût. Pendant que Dimitri précise ironiquement que dans son pays d’origine, l’Ukraine, ce même classique se nomme Colchique dans la toundra, Caroline se moque de la chanson. Le couple s’enferme alors dans un échange houleux. Didier, pour se faire pardonner, demande à Caroline de chanter puisqu’elle le fait si bien, allant jusqu’à dire qu’il accepterait tout si elle le demande en chantant. Maligne et espiègle, celle-ci s’essaye alors à un : « Sors la poubelle et rince la baignoire » lyrique et profond. Fous rires dans la salle ! De cette discussion naît le débat qui oppose nos deux artistes…leurs préférences musicales. Didier, fervent adepte du jazz, dénigre le classique: « Le classique, ces musiciens qui jouent des morceaux déjà joués des milliers de fois ». Elle, chanteuse lyrique, défend ardemment la rigueur du classique et taxe le jazz de « musique de sauvage » et de « parfaite musique d’ambiance pour ascenseur ». Vexé, Didier se lance dans une série de blagues sur les compositeurs classiques : « Mozart, Beethoven et Bach vont boire un coup. Bach prend un whisky. Beethoven demande alors à Mozart ce qu’il veut boire. Celui-ci dit, je veux un baby comme Bach (baby come back) ». L’hilarité saisit à nouveau l’assemblée ! Il y a de l’eau dans le…gaz entre le jazz et la « diva ». Dans cette opposition d’idées, seul Dimitri juge que le principal est le message transmis et non pas l’étiquette du style. Touchés par ce compromis, les deux époux tentent d’alterner entre jazz et classique pour le plus grand bonheur des mélomanes présents dans le public. Public qui est d’ailleurs invité à siffloter des airs pour inspirer les artistes. La représentation se clôture par un solo de chacun. Caroline dévoile la puissance de sa voix et la profondeur de son vibrato. Dimitri effleure avec brio les octaves de son piano. Et Didier, aussi majestueux qu’effrayant de génie se lance dans un solo de violon intitulé « Globe trotter » où l’instrument, manié avec aisance tel un gadget, dévoile une multitude de nuances et de sonorités surprenantes. Naviguant de musiques aux accents exotiques à d’autres plus orientales, en passant par les cris de mouettes, les vagues qui s’échouent sur les récifs ou encore le sifflement des trains, Didier qui va même jusqu’à se mêler à l’assistance est à couper le souffle. La représentation s’achève sur un « Dieu bénit tout ceux qui s’aiment »…Un message en adéquation avec l’œuvre entreprise par le projet « Margose, invitation au voyage » pour une mixité pacifique des cultures.

On rigole généreusement de cet humour aussi raffiné et mondain que léger et désopilant. Didier Lockwood est à mourir de rire dans son jeu d’acteur aux mimiques extrapolées, aux petits pas dansés et aux blagues à un sou. Caroline Casadesus est époustouflante dans cette diva qui est aussi décontractée qu’on pourrait la croire « cul pincé ». Et Dimitri Naïditch est fabuleux dans ce costume de pianiste nonchalamment talentueux au fort accent Ukrainien qui affiche un humour so british. Eclats de rires à volo et standing ovation de la part de cette salle comble qui remercie la troupe pour ce spectacle fantasque, original et empli de génie. Les deux heures de représentations sont passées comme une seule, dans une composition résolument sans fausse note. Un spectacle, source de nombreuses images mentales pour une invitation officielle au voyage et au mélange des cultures. Le spectateur ressort enjoué et souriant de cette représentation oscillant entre concert et pièce de théâtre. Une représentation où les mots sont en musique et la musique, devenue jeu comme les mots, se transforme en véritable échange entre acteurs. Tout simplement divin…

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Mumu,
ton blog s'enrichie de semaine en semaine...quel pur plaisir que de lire cette prose coulant de ta plume..fidèle à toi même et toujours plus passionante de jour en jour!!!!A quand la publication de ton oeuvre ? Très bientôt j'espère. Je crois en ton talent!!!!!!!Merci de nous offrir le plaisir immense de te lire.

Tu me manques énormément,
Rachel qui pense fort à toi.