vendredi 15 février 2008

Le Oogie : un lieu insolite sur le Cours Julien


Au 55 cours Julien à Marseille est implanté le Oogie. Un « concept-store » vintage qui oscille, depuis sa création en 2006, entre style rétro et contemporain.

« Je peux vous aider ? » demande un des serveurs. La question sonne comme la preuve de la surprise provoquée par le lieu. En plein cœur d’un quartier populaire de la ville, où se jouxtent bars typiques et autres pmu, le Oogie se distingue. Pas seulement une brasserie-restaurant, ni totalement une boutique, pas exclusivement un salon de coiffure, ni simplement un cybercafé. Il est un peu tout ça... Certains y dinent à 16h tout en regardant un dvd sur l’écran mural, d’autres discutent au son des musiques rétro et électro tandis que les derniers essaient des vêtements avant de filer à l’étage « Chez Joce » se faire couper les cheveux ! Tout se conjugue et se complète étonnamment sur les 400m² parfaitement agencés que compte le lieu. Bien qu’insolite, le Oogie est épuré, lisse et ordonné.
Ici, le mobilier actuel aux coloris vitaminés, les peintures abstraites et le matériel hi-fi dernier cri côtoient les livres sur le pop art, les vêtements vintage et les vieux vinyles. Le Oogie déroute mais ne manque pas de style ! D’ailleurs, ses occupants – employés ou clients – n’en manquent pas moins. Jean slim et t-shirts près du corps à l’appui.
Le personnel, particulièrement jeune, est au petit soin de ses chalands. Les « Ca va, ça vous a plu ? » résonnent constamment sans pour autant devenir outranciers et le tutoiement est de rigueur. Néanmoins, ici on vide soi-même ses restes dans le récipient prévu à cet effet.
Dans ce lieu atypique, les univers se côtoient - cuisine ouverte sur la salle, puits de lumière pour une vue en contre-plongée du salon de coiffure – et rien ne vient briser l’harmonie de l’espace, même pas quelques effluves de nourriture ou des prix excessifs.
Sorte de téléportation géographique et temporelle, on s’attendrait presque à voir ici Andy Warhol surgir de sa boite de soupe Campbell et Charlie Chaplin de son chapeau melon.

mercredi 6 février 2008

Rencontre avec…Richard Martin


« Allumer des feux et faire se rencontrer des Hommes »

Solliciter Richard Martin - directeur du Théâtre Toursky, de l’IITM France (Institut International du Théâtre Méditerranéen) et initiateur du projet Odyssée - pour faire de lui un portrait lorsque vous le connaissez quelque peu, c’est se voir offrir une de ses accolades franches, amicales et enjouées, et vous entendre dire « Mais tu n’as plus besoin de moi pour écrire mon portrait ». Richard, c’est un peu ça…Un brin de tendresse et de complicité, de la sensibilité à foison, un rire d’enfant, un regard utopiste aussi – tantôt réjoui tantôt affecté – un bout d’enfance dans un corps d’homme, un paradoxe qui le rend proche et intimidant à la fois. Un tantinet insaisissable et sauvage donc ; Richard Martin est avant tout un homme de théâtre engagé. Dès lors, esquisser son portrait prenait ici le visage d’une évidence.

Euroméditerranée, opération liée au processus de Barcelone créé en 1995, intègre en son sein un pan culturel et humain. Un chapitre visant à promouvoir le dialogue entre les cultures. Idée si chère à Richard, qu’il a su déployer au travers de ses Odyssées - ces biennales homériques - parcourant depuis 2001 l’Europe et la Méditerranée. Triturant délicatement l’emballage du sucre venu édulcorer le café que nous buvons ensemble, il me confie ne pas croire au pouvoir esseulé d’instances nées pour susciter le dialogue interculturel. L’homme reconnaît les retards pris par la politique et répond à ce sursis que « L’essentiel sera toujours porté par les Hommes […], sinon les petites choses qui se font ne sont que ponctuelles, conjoncturelles et ne cimentent pas grand-chose ». Richard croit avant tout en l’humain et reste persuadé que « la raison aura raison ». Pour cet artiste éclairé qui érige le rêve comme droit de l’Homme, l’Odyssée ne doit être que « le tremplin vers de nouvelles rêveries ». Ces rêveries nourries par l’art, ce liant des rencontres humaines. Continuant de s’amuser en roulant le même papier autour de son index - le regard tantôt sur la table tantôt dans le mien - le ton est réfléchi autant que l’attitude est méticuleuse. Occuper le geste pour mieux laisser voguer l’esprit au gré de mes interrogations. Celui qui « travaille à ce que l’homme qui ne sait pas, finisse par savoir », prend une voix mêlée de dérision et d’espoir lorsqu’arrive mon ultime requête. Et au centre de tous tes projets Richard, comment te définis-tu ? : « Je suis un poète qui a oublié d’écrire »…Silence…Puis d’ajouter « Nos poèmes on les écrit avec des bateaux. Ma vocation est d’allumer des feux et de faire rencontrer des hommes », avant de parachever le sourire aux lèvres « Les poètes me donnent l’allumette et moi je suis le grattoir ». Un brin caustique, une larme d’inquiétude, un filet d’autodérision et un soupçon d’espièglerie, tel est l’insolite mélange de cet homme au grand cœur prêt à tout pour poursuivre ses idéaux résolument humanistes et « donner l’impulsion de la rencontre et de l’échange à ceux qui sont loin de ça».

samedi 2 février 2008

Billet d'humeur


Une « République »…Non, un Empire !

Marseillais ! Vous n’êtes pas sans savoir que la rue de la République se métamorphose depuis 2004. « L’un des plus vastes chantiers de rénovation urbaine en France » selon Euroméditerranée, qui comprend entres autres une réhabilitation de l’habitat. Un lifting en profondeur mené par la Communauté urbaine Marseille Provence Métropole présidée par Mr. Jean-Claude Gaudin ; avec comme nouveaux propriétaires et gestionnaires, Marseille République pour l’habitat et ANF Eurazeo pour les commerces. Un bien remarquable projet faisant écho au sondage TNS-SOFRES conduit en juin 2005 qui concluait que 88% des Marseillais jugeaient la réhabilitation nécessaire. Un échantillon de population dont nous ne saurons rien pour un sondage portant le masque d’une fausse bonne conscience manifeste! Mais une rue, si c’est bien sûr du bâti et des commerces, c’est avant tout des habitants, une histoire, une ambiance, un esprit. Pourtant, rien ou si peu n’est dit sur le devenir de tous ces habitants contraints de se reloger ailleurs. Des locataires et propriétaires, très attachés à leurs appartements au point de s’y succéder de générations en générations. « Nous voulons la mixité sociale. Avant, il n’y en avait pas rue de la République, puisqu’il n’y avait que des habitants pauvres » s’exclamait en 2006 Eric Foillard, PDG de Marseille République. Malgré une volonté de réaliser des logements sociaux, c’est bien la mise sur le marché d’habitats « de qualité » qui intéresse les protagonistes ! Des logements accessibles à qui ? Quelle riche mixité que celle en devenir…D’autant que les méthodes d’expropriation employées sont clairement scandaleuses ! Interdiction de renouvellement de bail ou encore dépossessions impromptues pendant l’absence de certains…Une réfection emblématique de la déconfiture d’une politique de logement dirigée sur Marseille depuis dix ans : allongement des demandeurs de logements sociaux, fracture nord-sud, engagement à la spéculation pour les couches aisées…. Celle qui porte fièrement le nom de République peut bien reprendre aujourd’hui celui d’Impériale ! Ce nom qu’elle portait au XIXème siècle jusqu’à son réaménagement raté, dans le seul but d’attirer au centre ville la bourgeoisie marseillaise. Inexorablement, les échecs des politiques de logement passées ne semblent pas servir de leçon ! De la République à l’Empire, du pouvoir consubstantiel du peuple à la segmentation des classes, du social au profit… Rue de la République, une artère qui décidemment chemine à contresens !!

jeudi 31 janvier 2008

Exilio en images

A côté d'une activité d'écriture, je me plais depuis peu à réaliser des montages vidéos...

Voici celui réalisé pour la Compagnie Théâtre & Mémoires afin de présenter son dernier spectacle, EXILIO.

mercredi 30 janvier 2008

Des Idéaux


C’est la Compagnie Alzhar d’Aix en Provence qui occupait la scène du Théâtre Toursky dans la soirée du 29 janvier. Une troupe friande d’expérimentation théâtrale qui a construit ce spectacle à force d’ateliers et de rencontres au cours de soirées mensuelles d’échanges, d’écritures et de recherches communes. Des Idéaux propose de créer un monde où les idéaux se sont évanouis et où l’homme est laissé seul face à ses élans les plus vils. Une thématique pourtant inspirée et inspirante que la compagnie n’a pas su véritablement exploiter...

Sur cette scène occupée dans sa totalité et dénuée de véritable décor, les arts se mélangent : danse, chant, théâtre et musique. Un mélange bien souvent à la limite du tourbillon pour le spectateur qui ne sait plus vraiment où donner de la tête. Dans cette agitation, une question ressurgit constamment en écho : « Où en êtes-vous de vos idéaux ? », véritable épine dorsale de la pièce. Le public, muni d’une feuille de papier et d’un crayon peut alors tenter d’apporter sa propre réponse, pendant que sur scène les comédiens portent la leur. « Moi, mon idéal est de faire pipi sous les étoiles » dira l’une, « Moi mon idéal est d’atteindre la normalité. Celle montrée par la publicité…Mais un jour j’ai compris que ma différence était ma liberté » rétorquera l’autre. Une première réplique qui frise le ridicule et le non-sens, tandis que la seconde mériterait d’être approfondie…mais ne l’est pas ! On atteint plus tard le paroxysme de l’inintérêt lorsque l’un des personnages – nommé « O » père – dit à sa « O » fille : « Quand ton frère reviendra, vous baiserez ensemble ! ». Thématique érotique incongrue qui vient se greffer aux multiples redondances de l’idée dans le spectacle. Déposer les armes de nos idéaux, comme le revendique ici la compagnie, revient-il à être obnubilé par les questionnements d’ordre sexuel ? La question a de quoi laisser pantois…La joyeuse famille « O » offre ainsi au public ses multiples aventures : du combat de « O1 » et « O2 » (où il faut y voir un combat d’idéaux) aux déambulations frénétiques de certains acteurs aux allures de pantomimes, jusqu’aux sphères qui envahissent la scène, figurant certainement les différentes sphères et strates de la population. Entre positions grotesques et discours incohérents dans un parlé bien souvent à la limite du supportable, les noms d’Hannah Arendt et de Nietzche fusent sans trop savoir où retomber…

Tout est entrepris sans jamais aboutir à tel point que le propos de la pièce aurait été difficilement identifiable sans le document d’accompagnement distribué par la compagnie. Des Idéaux souffre d’une trop grande abstraction dans sa mise en scène qui le rend totalement hermétique à une partie du public – qui a d’ailleurs quitté la salle avant la fin de la représentation. On soulignera néanmoins un effort esthétique grâce aux costumes colorés et aux retransmissions sur rideau-écran d’instants filmés en direct qui forment des touches tels une peinture impressionniste. Un autre effort, musical lui, est à noter grâce à des improvisations inspirées aux accents expressionnistes. Malgré tout, l’ensemble manque véritablement de sens et de prise en compte du public. Grandiloquence du jeu et minimalisme scénographique y sont, eux aussi, mal conjugués. « Les i des o, les i dans les o », mais les idées…où ?

dimanche 27 janvier 2008

Tecktonik: a polemical dance

Since last July, a new dance has reached a large part of the young people… It’s the Tecktonik! Do you know about it ?


Tecktonik, often abbreviated TCK, was born in a French night club - “The Metropolis”, near Paris - in Rungis in 2000 with a new concept of party named The Tecktonik killer. However, its success is very recent and mainly due to the community websites on Internet. Its creators are Cyril Blanc and Alexandre Barouzdin, two members of the artistic staff of the "Metropolis". Now, for their biggest joy, Tecktonik goes beyond the French’s frontier… Originally, its name comes from a pun about the geological theory of the plate’s tectonic. This reference isn’t chance but it is connected to the atypical jerky and quick movement adapted to the Hardstyle music’s rhythm. Tecktonik is also a registered trademark.

In spite of this success, this dance has been in the heart of a controversy for several weeks. Indeed, a rumor has spread over the Internet…Tecktonik could be a Nazi movement! Why? It’s a poster for the new Tecktonik Killer party that initiated this controversy. It represents a man with a German officer’s cap of the Second World War and wearing a gas mask (photography 1 & 2). A poster in bad taste!






Besides, Tecktonik’s logo is an eagle (photography 3 & 4), the king of the birds and the symbol of pride, accompanied by a red star and the marketing’s line is between gothic and cold war with a provocative side. Very strange and meaningful for some people, only a coincidence for others…Be that as it may, this ending murmur adds to the other negative aspects raised by the anti-tecktoniks. Indeed, some people blame the Tecktonik for being more commercial: TF1 Company is now the international agent of the brand, there is even a fast-food that created a Tecktonik menu! This trend seems to be “the goose that lays the golden eggs” for the company. But now where is the dance behind all this profit? Moreover, contrary to the other dances, it isn’t possible to organize Tecktonik party because it’s a deposited brand. Odd behaviour by the creators, which shows the importance attached to marketing. Consequently, more and more websites and groups are created against Tecktonik: BAT for Brigade antitecktonik, demonstrations antitecktonik…

Envied success, false war or dangerous movement? The teenagers answer… So, pro or con Tecktonik?


mercredi 16 janvier 2008

Meilleurs voeux à vous....

Un petit mot pour vous souhaiter à tous et toutes une bonne et heureuse année 2008!!!


En pleine préparation de mon mémoire de fin d'étude, les articles sur mon blog se font plus rares...Vous pourrez retrouver, pour ceux qui le désire, certaines de mes critiques sur : www.ruedutheatre.info
A bientôt!

jeudi 13 décembre 2007

Marseille : Salon Métierama du 24 au 26 janvier 2008 [2]

Chimie et biochimie à la mode écolo

Les métiers de l’industrie chimique et biochimique sont des métiers en tension où les offres d’emploi sont supérieures aux demandes. Depuis presque quinze ans, les jeunes sont de plus en plus nombreux à s’en détourner principalement du fait d’une méconnaissance du secteur. Pourtant, celui-ci offre des débouchés considérables avec une durée moyenne de recherche d’emploi inférieure à un mois selon l’ANPE.
Si vous êtes curieux, persévérant ou bien encore « Géo Trouvetou » dans l’âme, les métiers de la chimie et de la biochimie sont faits pour vous ! Comment faire des compacts disques à partir du maïs ? Comment transformer le pétrole en matière plastique ? Comment neutraliser les polluants dans la mer ? Ou bien encore, comment aider une enzyme à se développer ? Autant de questions auxquelles ce secteur industriel - innovant par excellence -, tente de répondre en s’adaptant à notre univers en constante mutation. Un monde dans lequel les tendances écologiques actuelles entraînent une redynamisation.
De l’ouvrier à l’ingénieur, du créateur de cosmétiques au professeur, en passant par les techniciens et agents de maitrise, la chimie et la biochimie proposent des emplois à différents niveaux de compétences. De nombreux parcours sont envisageables : BEP, Baccalauréats professionnels, IUT mais aussi cursus LMD ou bien encore l’IUFM.
Rendez-vous donc au pôle Chimie et biochimie du Salon qui vous proposera une conférence dirigée par la Fédération des industries chimiques, ainsi que des rencontres avec les enseignants des disciplines concernées.

Marseille : Salon Métierama du 24 au 26 janvier 2008 [1]

Discrimination à l’emploi : faire valoir ses droits

Poursuivre des études pour exercer le métier de ses rêves sans y parvenir, avoir le profil adapté et n’être toutefois jamais embauché…N’être regardé que par le miroir déformant de la couleur de peau, ou bien tout simplement recalé par la consonance du nom inscrit sur un cv...Autant de cas de figure qui perdurent pour autant de discriminations à l’emploi prohibées par la loi. Aujourd’hui encore, quatre fois sur cinq un candidat dit « d’origine hexagonale ancienne » est favorisé face à un demandeur d’emploi français d’origine africaine. Le chômage touche, lui, trois fois plus les jeunes diplômés issus de l’immigration que les autres.
L’égalité, inscrite dans le triptyque français, n’est toujours pas – au XXIème siècle – respectée. La Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité), représentée en région PACA par Madame Eskenazi, la promeut en combattant les discriminations. Sensibilisation et engagement des entreprises, information et accompagnement des personnes discriminées, valorisation et diffusion des bonnes pratiques ; pour que les comportements ségrégationnistes cessent et que jaillisse l’égalité des chances pour tous.
Si des entreprises œuvrent dans le sens de l’acceptation et de la valorisation de la différence, certaines réitèrent encore les comportements discriminants. Victimes de ce type de conduite ou, tout simplement, désireux de savoir s’en prémunir, rendez-vous au salon, à l’espace consacré à l’inclusion des jeunes dans le monde du travail.

vendredi 7 décembre 2007

Semaine Azerbaïdjan au Théâtre Toursky

Résolument ouvert sur le monde et le partage entre les cultures, le Théâtre Toursky a mis l’Azerbaïdjan à l’honneur durant la dernière semaine de novembre. Roustam Ibraguimbekov, célèbre scénariste, dramaturge et producteur Azerbaïdjanais était présent à Marseille pour la diffusion d’Adieu ville du sud, long métrage inspiré d’une de ses nouvelles - Bakou, fin des années 80 - et la représentation de Cherche partenaire pour rencontres épisodiques, par le Théâtre Ibrus. Voyage initiatique à la découverte d’un univers psychologique et singulier…

Ibraguimbekov : l’homme du Caucase

Roustam Ibraguimbekov - diplômé de l’Institut de Cinématographie de Moscou – est l’auteur de plus de quarante longs métrages et scénarios pour la télévision, de nombreuses pièces de théâtre et œuvres en prose. Internationalement reconnu pour ses créations, il demeure néanmoins méconnu en France, où la culture Azerbaïdjanaise n’est que peu évoquée. D’ailleurs combien savent exactement situer ce pays ou encore conter son histoire géopolitique? L’Azerbaïdjan est un territoire du Caucase, dont la capitale est Bakou. Frontalier avec la Géorgie, la Turquie, l’Arménie, l’Iran et la Russie ; il a longtemps oscillé entre indépendance et intégration forcée. Finalement devenu autonome depuis l’effondrement du bloc communiste le 30 août 1991, ses dirigeants ont choisi l’alliance politique avec les Etats-Unis. Premier pays démocratique de confession musulmane à accorder le droit de vote aux femmes, il connaît aujourd’hui une situation macro-économique satisfaisante mais doit encore relever le défi de la diversification des ressources et d’une répartition plus juste des richesses. Des conflits politiques intérieurs, religieux et territoriaux persistent actuellement dans le pays. Ce sont tous ces particularismes historiques qui ont forgé et forgent encore les œuvres d’Ibraguimbekov, comme une signature, une empreinte inaltérable. Né en 1939 à la capitale, il a connu les différents régimes de son pays et en témoigne dans de nombreux films - Soleil blanc dans le désert (1970), Interrogation (1979), Garde moi, mon talisman (1986), Urga (1991), Près de l’Eden (1991), Soleil trompeur (1994), Le barbier de Sibérie (1998) et Est/Ouest (1999) – primés pour la plupart. Chronique du Caucase, crime, drame psychologique et historique se conjuguent dans ses œuvres qui offrent une place dominante aux relations parfois difficiles entre pays, et aux liens entre les Êtres. Le psychisme des personnages, la conscience et la perception comme terrain d’exploration.

Sur les planches comme sur écran

Tel est l’épine dorsale de Cherche partenaire pour rencontres épisodiques présenté au Toursky vendredi 30 novembre. Cette pièce de théâtre jouée depuis plus de cinq ans dans les pays de l’est, dont plusieurs représentations à Moscou, dresse le portrait d’un couple ordinaire confronté à la dureté du temps qui passe et au vide du quotidien. Une création théâtrale à l’empreinte cinématographique forte où un ménage apparemment sans accrocs vit dans la rassurante mécanique du bonheur illusoire. De ceux qui vu par le miroir déformant de l’extériorité nous ferait dire : « Ah, que j’aimerais leur ressembler ». Mais la réalité est mensongère… Lui est scientifique, elle – rédactrice dans une maison d’édition. Deux postes à responsabilités pour un couple d’intellectuels modèles hors du besoin financier. Le déficit ici se compte plutôt en tendresse, partage et intercompréhension. Sous forme de huit-clos dans le salon familial, c’est un duel psychologique qui s’engage pour ces deux êtres si apparemment solides que profondément perdus, à cran. Car donner l’impression d’être en harmonie est pour eux la seule façon de vivre. « Il vaut mieux jouir de la vie que d’en parler » précise le texte. Assumer les erreurs du passé et accepter que le temps érode, parfois, les sentiments est bien plus ardu et insupportable que travestir la vie. Dans un jeu de psychés où les faux semblants dominent, tout est finement orchestré pour donner un sens à l’existence. Une orchestration basée sur la frontière invisible, terrible et insidieuse entre l’imaginaire de chacun et la réalité commune. Elle, rêve son mari en amant fougueux ; lui, songe à sa femme en plantureuse créature qu’elle n’est pas. Autant de rêveries chimériques personnifiées sur le plateau par deux autres personnages, si bien que deux couples distincts et idéals s’offrent finalement au public. Cette œuvre théâtrale aborde l’épineuse question du regard d’autrui. De la différence entre l’être, le paraître et le vouloir paraître et du difficile et rare équilibre qui permet de faire taire cette dissemblance. « Chaque couple établit ses règles », les dits, les non-dits…Ici, vivre en couple c’est lutter contre le silence des ressentiments – avec la jalousie et le mensonge comme anges gardiens – pour continuer à vivre, à feindre le bonheur pour usurper le réel. S’affronter pour mieux se réconcilier, contrefaire pour demeurer heureux avant tout ; telle est la règle pour ces êtres qui se déchirent autant qu’ils s’aiment. Une référence non fortuite donc au célèbre Cadavre vivant de Léon Tolstoï où le bonheur est au-dessus de tout, de la vie même pour le héros Fédia qui se suicide pour que son épouse Lisa soit enfin heureuse. Cherche partenaire pour rencontres épisodiques est une pièce psychologique, désarmante, lancinante même où le jeu renvoie le spectateur au réalisme angoissant de cette situation. Cette universalité humaine de condition selon laquelle l’Homme a besoin d’être apaisé jusqu’au risque de se tromper lui-même…